1.5.6.2. Lev Carlovitch de Bode – Illustrated Descendancy

1.1.5.(b).11.2.8.5. baron Léon Lvovitch de Bode
° 23.8.1820 + 15.6.1855 enterré dans l’église de Po­krovski-Mestcherski
Lieutenant aux Chasseurs de la Garde, puis gentilhomme à la Cour. En 1853-1855, conseiller aulique, maréchal de noblesse de Podolsk, gouvernement de Moscou.
Dans la collection du Musée de Murano, l’ancienne propriété de la famille Boratinsky où vécut sa soeur Hélène Lvovna [1.1.5.(b).11.2.8.8.], est exposée une lithographie datant de 1848, représentant Alexei Fedorovitch Lvov [illustraton ci-dessous], le compositeur de la musique de l’hymne national russe « Dieu sauve le tsar ». Une inscription manuscrite (à droite dans le bas) a été ajoutée par Alexei Lvov : « don de Lvov au baron Lev Lvovitch Bode – 1er juin 1850 ». 

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Capture d_écran 2017-08-02 à 14.34.50Un an avant la fin de la guerre de Crimée, Léon Lvovitch meurt de la fièvre typhoïde qui sévissait dans l’unité qu’il commandait. Ironie de l’histoire, le corps expéditionnaire international est commandé par le maréchal Armand Leroy de Saint-Arnauld [illustraton ci-contre], époux de la marquise Louise de Trazegnies, elle-même descendante du premier mariage de Justus Wolrat von Bode [1.1.5.]. Des cousins combattant dans des camps opposés, une situation fréquente à l’époque, émigration oblige.
Deux semaines avant son décès, le 29 mai 1955, parmi les lettres écrites pendant la campagne de Crimée par les frères Charles, Alfred et Edouard Minart (Sabretache, 1910 Vol. XVIII – page 275) à leur famille, on peut lire :

Au camp de Traktir, près du pont de la Tchernaïa :

Ma bonne Camille,

Ils ont été chassés au-delà du village de Tchorgoun. A l’entrée de celui-ci, se trouvaient des gourbis occupés par les Cosaques ; rien n’était plus sale que ces maisons souterraines. Nous y avons trouvé du pain au four, du riz qui cuisait et mille petits objets utiles. Le général qui commandait là n’a pas pu emporter son portemanteau. On y a trouvé des épaulettes superbes, un ceinturon avec des glands en argent, un hausse-col, un porte-monnaie avec 300 francs, etc. On prétend que ce général s’appelait Bode.

x 1842 sa cousine Anne Petrovna Kolytchev
° 18.6.1824 Moscou + 1867 couvent de Zemliansk
Fille de Pierre Nicolaïevitch et de Varvara Nicolaïevna Barteniev ; elle possède en 1860, 477 serfs sur 6.000 ha à Stoudencé, district de Balachov, et 1.950 ha à Nedostavovo, district de Riazan. Devenue religieuse sous le nom de Maria, elle fonde le couvent Znamensky à Zemliansk. Une grande partie des terres qu’elle laissa à ses enfants a été vendue pour terminer les travaux de construction du couvent.

Extrait des Souvenirs de Fedor Bouslaev, précepteur des enfants de Lev Carlovitch :

Peu de temps après avoir emménagé de Metcherskoïé au Kremlin à Moscou, mes étudiantes furent rejointes par une troisième. Il s’agissait d’Anna Petrovna Kolytchev, leur cousine orpheline, qui nous avait été amenée juste après le décès de son père. Dans ses dernières volontés, il demandait qu’elle soit placée sous la garde de sa tante, la baronne Nathalie de Bode. Anna Petrovna était une jeune fille de treize ans, grande de taille comme Elena Lvovna mais d’apparence encore plus grande à cause de sa minceur. Son beau visage était quelque peu obscurci par l’austérité de son expression, dégageant comme un sentiment de crainte. Ma mémoire garde le souvenir de l’image de quelqu’un au visage empreint d’une tristesse inconsolable et d’un certain désespoir. Il va sans dire qu’Anna Petrovna trouva au sein de la famille du baron Lev Carlovitch une heureuse protection. Elle se sentait bien chez elle, tant dans sa nouvelle demeure qu’au village, ce qui ne put que favoriser son évolution ultérieure.
En ce qui concerne la plus jeune du groupe de mes étudiantes, la baronne Anna Petrovna, je tiens à dire quelques mots sur son sort. Elle aimait passionnément son mari (le baron Lev Lvovitch, le frère aîné de mes étudiants) mais son bonheur fut de courte durée : en 1855, au moment de la guerre de Crimée, il décéda soudainement par suite d’une fièvre contagieuse, contractée dans le détachement militaire qu’il commandait. Inconsolable, pétrifiée de désespoir, submergée par une douleur infinie … les prémices d’une aliénation de soi-même – ce qui m’avait déjà fort intrigué chez elle alors qu’elle était une petite orpheline devenue ensuite une jeune veuve de trente ans – elle se mua en une renonciation à tous les attraits de la vie, en se distanciant totalement par rapport aux personnes et au monde. Joies et peines, pensées et rêves, elle avait enterré tout cela dans la tombe de son mari bien-aimé. Plus rien ne la retenait aux choses de ce monde, ses prières et ses larmes s’élevaient vers Dieu. Délaissant même les enfants qu’elle avait cherché à protéger, eles se tournait maintenant vers les autels des monastères et ermitages. C’est tout ce qui lui restait sur terre …

Après avoir erré auprès de différents couvents, Anna Petrovna choisit finalement de terminer sa vie dans son propre monastère qui fut érigé dans le comté de Zemliansk dans la province de Voronesh, au lieu-dit Znamensky. C’est là qu’elle mourut après avoir fait des voeux secrets, ce qui permettait aux moines et nonnes de garder des habits séculiers.

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Extrait des Souvenirs de Maria Alexandrovna Wolodimeroff, née Kroustchov [1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.] :

Quand mon grand-père mourut, ma grand-mère – qui l’aimait beaucoup – se retira du monde (elle était très fortunée) et se mit à penser au monastère. Elle voulut que tous ses enfants y entrent. Ma grand-mère, Anne Petrovna Kolitcheva, chercha vraiment un endroit pour un monastère. Elle partait toutes les nuits en calèche de sa propriété. Il n’y avait alors pas de chemin de fer. Elle s’endormit dans l’attelage et vit en songe descendre l’icône de Znamenië, la Vierge Marie, au dessus d’une jolie rivière et d’un petit bois.

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Cette histoire se passait en été et quand elle se réveilla entre 5 et 6 heures du matin, elle vit précisément cet endroit. Passait un paysan, elle lui demanda à qui appartenait cet endroit. Il nomma la personne et lui dit que cet endroit était à vendre. Elle se rendit chez le propriétaire, l’endroit se vendait réellement et elle l’acheta sur le champ. Elle commença à construire le bâtiment principal avec une église attenante et de petites maisons pour une quarantaine de moniales. Puis, les moniales commencèrent à arriver. De nombreux riches marchands firent beaucoup de dons pour l’église. Mais ma grand-mère ne vécut pas longtemps : elle mourut et fut enterrée sous l’église. Quand j’eus 18 ans, j’allais là-bas : il y avait déjà une grande église blanche, ressemblant à l’église du Christ Sauveur mais pas encore consacrée.

Fondé en 1866, le monastère est inauguré en 1868, un an après le décès de sa fondatrice. Ce n’est qu’en septembre 1897 que sera consacrée l’église en pierre. Erigée en l’honneur de la Sainte Trinité, elle comporte cinq dômes. Au début du 20ème siècle, le monastère héberge jusqu’à 53 nonnes, 21 novices et 25 candidates, soit 99 personnes au total. Le monastère est fermé en 1918.

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Les bâtiments sont ensuite sytématiquement démantelés. L’église est détruite à l’aide d’explosifs. Durant la seconde guerre mondiale, de violents combats y ont lieu. Aujourd’hui, on peut y voir des croix sur les tombes de soldats allemands. Leurs familles viennent parfois d’Allemagne visiter les tombes. Après la guerre, le monastère hébergea un orphélinat puis le terrain fut vendu durant les années de la perestroïka. Il reste aujourd’hui quelques débris de pierre de l’église ainsi que quelques bâtiments dont la résidence de l’abbesse, les bâtiments ayant contenu les cellules. Un vaste jardin descend jusqu’à la rivière.

1.1.5.(b).11.2.8.5.1. baronne Olga Lvovna de Bode
° 1843 + 1865
Capture d_écran 2017-08-02 à 15.31.34Religieuse sous le nom d’Olympiasa au couvent de Borodino où elle meurt dans sa vingt-troisième année, au grand désespoir de sa mère. Extrait des Souvenirs de Fedor Bouslaev [photo ci-contre], précepteur des enfants de Lev Carlovitch :

Anna Petrovna donna sa fille aînée, une belle jeune fille de quinze ans, au couvent de Borodino où celle-ci mourut à l’âge de vingt-trois ans. Arrêtons-nous un instant sur cette caractéristique des barons de Bode. Je vous ai parlé de quatre nonnes dans mes souvenirs. Il y en avait une cinquième mais pas elle n’était pas orthodoxe. Catholique, mère supérieure d’un couvent situé non loin du Rhin, elle était la soeur du baron Carl Auguste.

Souvenirs de Maria Alexandrovna Wolodimeroff [1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.] :

Mon grand-père et ma grand-mère eurent trois enfants : l’aînée, Olga, un fils Iakov (Jacques) et une fille Anastasia, ma mère. Quand mon grand-père mourut, ma grand-mère – qui l’aimait beaucoup – se retira du monde (elle était très fortunée) et se mit à penser au monastère. Elle voulut que tous ses enfants y entrent ; sa fille aînée Olga entra au couvent lors de ses 19 ans et mourut de phtysie au monastère de la « Nouvelle Jerusalem » à côté de Moscou.

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Monastère de la « Nouvelle Jerusalem »

1.1.5.(b).11.2.8.5.2. baron Iakov Lvovitch de Bode
° 1846 + après 1897
Sous-lieutenant aux Hussards Loubensky en 1897 ; dernier propriétaire de Mestcherskoïe.
Extrait des Souvenirs de Maria Alexandra Wolodimeroff [1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.] :

Ma grand-mère emmena son fils Yakov au monastère de Zadonsk [illustration ci-dessous] près de Voronej. Il avait 16 ans, il était superbe avec d’épais cheveux longs. J’ai connu mon oncle Jachim ; il était vraiment beau gosse. J’avais une photo de lui en séminariste. A cette époque, le tsar Alexandre II, de passage à Voronej, demanda à mon mon grand-père Lev Lvovitch qu’il connaissait très bien : « Où est ton fils ? – Au monastère, » lui répondit-il. Alexandre II ordonna : « Sors-le de là de suite et envoie-le chez les Hussards ! » Ce qui fut fait immédiatement.

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Capture d_écran 2017-08-02 à 15.28.03En 1890, Yakov vendit le manoir à Nadezhda Mikhaïlovna Levaschevsky, la femme du colonel. Un an plus tard, l’Administration régionale du comté de Moscou fait l’acquisition du domaine pour y établir un hopital psychiatrique, dirigé par le docteur Yakovenko. Né en 1857, Vladimir Ivanovich Yakovenko [illustration ci-contre] est l’un des fondateurs de la psychiatrie sociale et de l’organisation de la santé mentale en Russie.
x Nathalie Egorovna Ziablov (Zeibel ?)
En 1900, elle possédait 586 ha à Alexandrovsk, district de Zemliansk.

1.1.5.(b).11.2.8.5.2.1. baronne Anna Iakovlevna de Bode
+ jeune

1.1.5.(b).11.2.8.5.2.2. baronne Evguenia Iakovlevna de Bode

1.1.5.(b).11.2.8.5.2.3. baron Lev Iakovlevitch de Bode
+ 1930 Serbie

1.1.5.(b).11.2.8.5.2.4. baronne Sophie Iakovlevna de Bode
° 1873 + 1889

1.1.5.(b).11.2.8.5.3. baron Fedor Lvovitch de Bode
° 31.10.1849 + 21.12.1851 (Nécr. Moscou)

1.1.5.(b).11.2.8.5.4. baron Serge Lvovitch de Bode
° 3.5.1851 + Toula 4.12.1901
Assesseur de collège
x 4.1884 princesse Olga Andreïevna Obolensky
° 26.4.1856 Moscou + 5.1.1940 Paris (Ste Geneviève-des-Bois)
Il est probable qu’Olga soit la « princesse Abalensky » citée ci-dessous :

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1.1.5.(b).11.2.8.5.5. baronne Anastasia Lvovna de Bode
° 25.8.1852 + 27.12.1878
Elle est enterrée près de Loukino
x 18.10.1868 Alexandre Ivanovitch Khroustchov
° 18.8.1858
Magistrat honoraire dans le district de Zemliansk.

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1. Maria Alexandrovna Kroustchov
x Sviatoslav Alexandrovitch Wolodimeroff

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1. Igor Sviatoslavovitch Wolodimeroff
x princesse Valentina Sergueïevna Stcherbatov [photo ci-dessous]
° 17.11.1898 Moscou + 7.7.1985
Fille du prince Sergueï Alexandrovitch Stcherbatov et de Pelagea Ivanovna Rozov.

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Ancien palais Stcherbatov à Moscou

Capture d_écran 2017-08-02 à 15.28.32Sa fille Assia Wolodimeroff est l’auteure de Souvenirs rédigés en italien, dédiés à sa mère « Babu era una gran Dama ». Diario di una principessa russa :

Il diario autentico di una giovane principessa russa fuggita da Mosca nel 1917 in seguito alle persecuzioni degli aristocratici da parte dei soviet. Nella sua vecchiaia, a Roma, Babu scrisse queste piccole memorie, in tono leggero e mai polemico, per raccontarsi ai suoi amatissimi nipoti.

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.1. Tatiana Igorovna Wolodimeroff
x USA Fedor Sergueïevitch Levchine [cfr 1.1.5.(b).11.2.8.7.2.2.1.]
Vivent à San FranciscoValentina Sergueïevna Stcherbatov

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.2. Sviatoslav Igorovitch Wolodimeroff
Extrait de la préface de « Babu era un gran dama » :

« Sviatoslav, l’oncle Slava, son fils le plus âgé, après quelques années passées en Argentine, a choisi de rester là où se trouvait sa famille avec une femme italienne, Camilla, dont il a eu deux enfants, Alessandro et Andrea. Ensuite, Slava s’est remarié avec Mary. Il a travaillé de longues années chez Swissair à Buenos-Aires. »

x (a) Camilla Belluzzi
x (b) Mary NN

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.2.(a).1. Andres de Wolodimeroff
° 21.12.1950
x NN
Vit à Buenos-Aires

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.2.(a).1.1. Andrea de Wolodimeroff 
En réponse à la publication de « Babu era un gran dama » :

« Je suis la petite-fille de Sviatoslav Wolodimeroff et de Camilla Belluzzi. Je suis heureuse de lire dans le livret de famille ce que m’ont raconté ma grand-mère et mon père Andres. Quelle émotion ! Je voudrais pouvoir communiquer avec Assia, je pense que nous connaissons, même si je ne parle pas italien. (12 mai 2012) »

x Andres Isakow

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1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3. Serge Igorovitch Wolodimeroff
° 5.10.1930 Paris + 31.3.1996 Roma

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Extrait de la préface de « Babu era un gran dama » :

« Serge, aimant beaucoup les voyages, a épousé à Rome ma mère Maria Teresa Cavalcabò Misuracchi Fratta, une riche marquise romaine. Sa sévère et bigote de mère, Geltrude Cherubini Menchetti, appuia fortement l’union. Il était tout simplement charmant mais sans le sou. Ce mariage n’a duré que huit années durant lesquelles le ménage a mis au monde cinq enfants : Assia, Tania, Alessio, Dimitri et Irina. »

x 1955 Rome Maria Teresa Stiepcevic Cavalcabò Marquise dei Misuracchi
« Il y a quelques années, Maria Teresa s’est amourachée d’un fascinant poète monténégrain, Sasa Podgorsky, dont elle a eu sa sixième fille, Ljuba qui est une excellente peintre. Durant les jours où elle ne peint pas, elle se consacre à cultiver toute l’année de merveilleux légumes de notre jardin. »

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.1. Anastasia (Assia) Wolodimeroff
Capture d_écran 2017-08-02 à 16.31.33« Je suis la fille majeure de Serge, le plus jeune frère de Babu et son préféré, à la vie aventureuse et quelque peu obscure. Je l’ai aimé énormément, il était son favori parce qu’il croyait qu’il avait le plus de succès que les autres. J’ai eu une longue relation de jeunesse avec Stefano Maria Cicconetti, un professeur de droit constitutionnel, dont j’ai eu deux fils magnifiques, Giorgio (1980), et Claudio (1981). Ensuite, j’ai épousé l’homme de ma vie, Giulio Grazioli, dont j’ai eu une splendide fille Anastasia (1986). Je suis éternellement reconnaissante envers Giulio. »
Presentazione di « 100 Ricette di Casa Grazioli » : Una raccolta di ricette tramandate dalle nonne e fornite dagli amici nel corso di molti anni. [illustration ci-contre]
x (a) Stefano Maria Cicconetti
° 13.1.1940 Roma
Diplômé en droit de l’Université de Rome « La Sapienza » cum laude, avec une thèse sur le droit constitutionnel intitulé « La continuité de l’Etat dans le cas de la révolution. »
Capture d_écran 2017-08-04 à 16.16.14x (b) 29.6.1989 Giulio Grazioli [armoiries ci-contre]
° 10.6.1943 Rome
Fils de Massimiliano Grazioli & Isabella Perrone. The Grazioli family orginates from the Valtellina in northern Lombardy and had workshops of ‘orzarolo’ in Rome. Vincenzo Grazioli (1770-1857) made his fortune in banking and insurance and was created a Duke by the King of the Two Sicilies in September 1851, which was recognised by the Pope in January 1852.

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.1.(a).1. Giorgio Cicconetti
° 1980
Résidant à Londres et travaillant dans le secteur financier

 

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.1.(a).2. Claudio Cicconetti
° 1981
« qui travaille dans le cinéma à Rome … »

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1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.1.(b).2. Anastasia Grazioli 
° 11.8.1986
Left to right, princess Beatrice of York and Anastasia Grazioli at Tallulah Rufus-Isaac’s 21st birthday party held at The Kingley Club, London on 24th September 2008.

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Giorgio Cicconetti et Anastasia Grazioli

Capture d_écran 2017-08-02 à 16.39.521.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.2. Tatiana Wolodimeroff
° 1959 + 2010 (?) [photo ci-contre]
Extrait de « Babu era un gran dama » : Tania, la rouge, assez folle et sympathique, après diverses vicissitudes s’est mariée avec Leo Serangeli et a un fils unique, Marco.
x Leo Serangeli

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.2.1. Marco Serangeli
Elle travaille actuellement aux Etats-Unis

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.3. Alessandro (Alessio) Wolodimeroff
Capture d_écran 2017-08-02 à 16.40.49Extrait de « Babu era un gran dama » : « Alessio, un brave et grand gars, a épousé Francesca Nolfo et a trois enfants : Valentina, Elena et Alessandro. »
x Francesca Nolfo
Active dans l’immobilier

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.3.1. Valentina Nolfo
Responsabile Segreteria Generale Ufficio Servizio Aste presso Notartel S.p.a. per il CNN

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.3.2. Elena Nolfo

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.3.3. Alessandro Nolfo

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Valentina, Elena et Alessandro Nolfo

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.4. Dmitri Wolodimeroff
Extrait de « Babu era un gran dama » : Dimitri (Titti), le divin, après une vie tourmentée et border line, a remis sa tête en place et a épousé la fantastique Cristina Gigli, déjà mère de Tommaso, et ils ont un fils magnifique, Leone, le plus jeune de tous.
x Cristina Gigli [photo ci-dessous]
Women’s ready to wear merchandising manager at gucci spa.

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1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.4.1. Leone Wolodimeroff [photo ci-dessus]

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.5. Irina Wolodimeroff
Extrait de « Babu era un gran dama » :

Irene (ou Irina ou Mimmi), belle et imprévisible, a eu cinq enfants de deux mariages, le premier avec Giulio Ceccichini Saulini (trois filles Anna, Alessandra et Benedetta), le second avec Luca Maroni, le plus grand expert en vins d’Italie (deux enfants Beatrice et Nicolò).

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NINA, il nuovo romanzo di Irene Wolodimeroff (2016) :

Due amiche si ritrovano dopo tanti anni in una bella villa alle porte di Roma. Qui riscopriranno la loro forte amicizia e un manoscritto che le coinvolgerà in una storia, quella di Nina, quinta di cinque figli nati dal matrimonio di una ricca marchesa romana, amante dell’arte, della cultura e soprattutto dell’idea del comunismo anni ’70, ed il principe Nikolay la cui famiglia era fuggita da Mosca nel 1917 lasciano ogni bene. Leggendo il manoscritto capiranno ben presto che la storia di Nina non è la storia di una famiglia, ma il racconto di una vita, il cammino archetipo che ognuno fa per scoprire se stesso. L’infanzia di Nina è snza amore, cresce temendo il mondo e le persone, quello stesso mondo e quelle stesse persone che le avevano causato dolore. Vive la sua vita sempre nascosta, facendo ciò che sarebbe stato giusto fare, sempre schiava della paura del dolore, subisce l’attrazione del male, lo abbraccia, si lascia umiliare. Quello di Nina è un percorso vero dentro l’inevitabile, fino a riconoscere quelle emozioni che per anni aveva dovuto nascondere a se stessa, chiuse in fondo all’anima e di cui avrebbe potuto liberarsi solo affrontandole.

x (a) Giulio Cecchini Saulini
x (b) Luca Maroni

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L’œnologue italien Luca Maroni est l’un des plus grands critiques de vins de la péninsule.

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.5.(a).1. Anna Cecchini Saulini
fréquente WSET’s London Wine & Spirit School 

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.5.(a).2. Alessandra Cecchini Saulini 

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.5.(a).3. Benedetta Cecchini Saulini

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.5.(b).4. Béatrice Maroni

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.1.3.5.(b).5. Nicolò Maroni

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Anna, Alessandra,  Benedetta Cecchini Saulini – Béatrice et Nicolò Maroni

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.2. Nathalie Igorovna Wolodimeroff
x et + en Russie

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.3. Marie Igorovna Wolodimeroff

1.1.5.(b).11.2.8.5.5.1.4. Irena Igorovna Wolodimeroff
citée comme cantatrice soprano en 1929x NN Rimsky-Korsakoff

1.1.5.(b).11.2.8.5.6. baron Nicolaï Lvovitch de Bode
° 14.8.1854 + 24.11.1854 (Nécr. Moscou)

1.1.5.(b).11.2.8.6. baronne Sophie Lvovna de Bode
° + en 1821

1.1.5.(b).11.2.8.7. baron Michel Lvovitch de Bode-Kolytchev
° 17.12.1824 + 22.3.1888 en son hôtel de Moscou – 52 rue Povarskaïa
Page de S.M. l’Empereur Nicolas Ier (1832), capitaine en premier de la milice (1855), maître des cérémonies et grand maréchal de la Cour (Almanach de Gotha de 1859 : « conseiller de cour, en fonction de maître de cérémonies »), chevalier de plusieurs ordres et grand-Croix de Russie, commandeur héréditaire de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Reconnaissance du titre baronnal en Russie par ukase impérial du 6.9.1840 et 21.12.1842, pour chacune des deux branches russes. Enterré avec son épouse à Lukino, district de Zvenigorod, dans le mausolée de famille.

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Capture d_écran 2017-08-05 à 09.16.09Souvenirs de Léon Soukhotine : [photo ci-contre]

Mon grand-père était un jeune homme beau, brillant, élégant, une tête à la Byron, une longue chevelure légèrement ondulée, une cravate romantique, un col rabattu. J’admirais toujours son portrait dans l’album de ma mère. Un mangeur de coeur autrefois, homme d’un tempérament sévère et fougueux, tyrannique même dans sa famille, d’une vie pleine de romans et d’aventures, le baron de Bodé était en même temps un mécène doué d’un goût rare et un connaisseur en matière d’art, ce qui était rare à une époque dénuée de goût.

Son portrait [illustration ci-dessous] est réalisé en 1843 (Michel a 19 ans) par le graveur Thomas Wright (1792-1849), beau-frère de George Dawe, le peintre attitré de la « Galerie des Maréchaux » du Musée de l’Ermitage à Saint-Pétersbourg.

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Extrait des Souvenirs de Fedor Bouslaev, précepteur des enfants de Lev Carlovitch :

Au centre du troisième groupe des enfants Bode se place la majestueuse et belle figure de Mikhaïl, mon pupille préféré et mon ami de toujours jusqu’à sa mort en 1888. Le baron Lev Carlovitch me pria de préparer son fils de quatorze ans, Mikhaïl Lvovitch, à entrer dans une classe supérieure du Corps des Pages [illustration ci-dessous].

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Comme à l’époque il n’existait aucun programme particulier, j’ai donné à ma manière des leçons de grammaire russe, d’histoire et de littérature à Mikhaïl Lvovitch. Ce dernier n’avait que six ans de moins que moi et moi-même, jeune homme imberbe, tout juste vingt ans. Je ne l’abordais pas comme dans une relation de maître à élève mais en tant qu’ami plus âgé vis-à-vis d’un plus jeune, désireux d’écouter ses avis et son enseignement avec confiance et diligence. C’est déjà à Metcherskoïé que nous avons de suite établi cette relation mutuelle. Je savais à quel point la bonne volonté peut favoriser l’éducation mentale d’un jeune garçon de quatorze ans. Je décelais rapidement des talents chez mon disciple, clés de ses succès futurs, soutenus par sa nature franche et généreuse ainsi que son habileté à atteindre ses buts.
A l’époque, alors que j’étais encore jeune et inexpérimenté, je n’étais pas encore en mesure d’être réellement conscient de cet état de choses, par rapport à ce que je vous exprime pour le moment. Je devais tout d’abord amener mon étudiant, doué d’une vive sensibilité et d’une grande curiosité d’esprit, à aimer la science par l’exercice de la pratique. Il ne fallait en rien le forcer, comme cela arrive trop souvent avec les débutants à qui on impose la fastidieuse corvée de l’apprentissage de la théorie.
Laissant la théorie de côté, je choisis d’enseigner les choses d’une manière pratique, en particulier parce que cela coïncidait avec le sujet de mes cours – langue maternelle et histoire nationale – dont le contour général était déjà quelque peu familier à Mikhaïl Lvovitch. De plus, il avait déjà une certaine compréhension du slavon d’église car l’Ecriture Sainte et les livres liturgiques ne lui étaient pas étrangers au sein de sa pieuse famille alors qu’ailleurs, ces livres sont souvent enfermés dans des armoires. En choisissant d’enseigner de manière ludique, j’atteignais un but précis : Mikhaïl Lvovitch en arriva à adorer la science avec la passion et la force de son fougueux tempérament. Il le démontra ainsi toute sa vie par son engagement à collectionner, à classer scientifiquement les sources écrites sur la Russie ancienne, y compris en ce qui concerne la restauration d’oeuvres d’art, d’icônes et de monuments. Il faut savoir qu’après seulement un court séjour à la haute école du Corps des Pages, Mikhaïl n’arrêta jamais d’étudier. Jusqu’à sa mort, il avait l’habitude de dire que toute son éducation scientifique, c’est à moi qu’il la devait.
Je vais vous raconter comment il fut mon premier véritable étudiant et l’un des plus fidèles. Il faut tout d’abord expliquer quelle était notre habitude de travailler, que ce soit durant nos leçons ou lors de nos temps libres. Notre source principale était basée Capture d_écran 2017-08-05 à 09.16.35sur l’ouvrage d’histoire (Lettres d’un voyageur russe), rédigée par Nicolaï Karamzine [illustration ci-contre] en plusieurs volumes, que nous ne suivions pas toujours selon un ordre chronologique. Pour une raison précise, je choisissais les passages les plus intéressants pas tant parmi l’histoire officielle mais surtout dans ce qui se rapportait à l’histoire de leur propre famille et de la vie des ancêtres, que ce soit sur le plan national, civil et religieux. Grâce à la maîtrise de ses exposés, Karamzine fut notre point de départ pour l’étude de l’histoire de la littérature ancienne. Ainsi, nous étions amenés progressivement à étudier la « Chronique de Nestor », les poèmes anciens, les écrits épiques de Kirsha Danilov, etc., pour aboutir à « Boris Godunov » et à « La Fille du Capitaine » d’Alexandre Pouchkine. 
L’insatiable curiosité de mon élève, alliée à l’extrême vivacité de son esprit, était constamment en éveil, même en dehors des horaires de cours. Parfois, il surgissait dans ma chambre – en été dans l’aile rustique à droite de la grande demeure, en hiver à l’étage supérieur du Pavillon des Cavaliers [illustration ci-dessous] – et qu’il me Capture d_écran 2017-08-05 à 09.16.47surprenait un livre en main, il voulait savoir ce que j’étais occupé à lire. Je devais lui raconter en détail le contenu du livre, pourquoi il m’intéressait ; il me posait une série de questions, faisait des commentaires personnels. Cela se terminait parfois par des discussions enflammées. Le maître et l’élève étaient devenus comme des amis d’école, cherchant à trouver des réponses aux problèmes de la vie qui, souvent, les dépassaient !
Mikhaïl Lvovitch épousa Alexandra Ivanovna Tcherkhov dont la mère était une nièce du comte Sergueï Grigoriëvitch Stroganov. A cette époque, Mikhaïl s’adonnait déjà entièrement à l’étude de l’histoire à laquelle il passa les vingt-cinq dernières années de sa vie. Travaillant sans relâche, il combinait l’amour immodéré d’un boyard russe envers son passé et ses traditions avec la détermination d’un baron féodal, dans le respect rigoureux des règles prescrites pour atteindre ses objectifs. Il n’était pas obligé d’effectuer des recherches dans toutes les directions parmi une masse de faits ou de personnages de l’histoire, comme l’aurait fait un chevalier du Moyen-Âge, enfermé dans son château. Au contraire, cela lui avait été donné dès la naissance, en héritage de ses ancêtres : les boyards Kolytchev, une famille chère à sa mère dont il se sentait l’héritier respectueux.
Il débuta dans cette quête en rassemblant toutes sortes de documents écrits, traditions orales et objets matériels se rapportant aux Kolytchev, que la famille possédait. Il les subdivisa ensuite par groupes pour en dresser une collection complète. Dès que le résultat de ses recherches fut atteint et que le matériel historique fut complet, il prit plusieurs années à rédiger un volumineux ouvrage qui devait lui permettre de représenter visuellement l’histoire des Kolytchev, symbolisée par l’architecture particulière des constructions érigées dans le village de Lukino, le long du chemin de fer de Smolensk, non loin de la gare d’Odintsovo. Finalement en 1886, il le fit imprimer sous le titre : « La Famille des Boyards Kolytchev ». [illustration ci-dessous]

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Anciennement, à la fin du siècle dernier et au début de celui-ci (19ème siècle), les propriétaires terriens russes avaient l’habitude de construire dans le style des anciennes villas italiennes ou du palais de Versailles de Louis XIV. Ces habitations étaient habituellement entourées de jardins et d’allées, d’arbres taillés de différentes façons, de pavillons style rococo que l’on surnommait « Ermitage, Belvédère, Sans Souci, Mon Repos, etc ». On plaçait dans les bosquets aux verts feuillages des faunes et des nymphes en marbre [photo ci-dessous datant de 1920], Apollon et ses muses, des Cupidons et autres habitants de l’Olympe, aux formes diverses et fantaisistes que les Italiens appellent le « Baroque ».

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En ce qui concerne les bâtiments de Luchino, Mikhaïl Lvovitch choisit délibérément un style totalement différent qui correspondait bien à ses goûts et au résultat de ses recherches historiques. Mikhaïl avait grandi au Kremlin à Moscou, entouré de bâtiments dont l’architecture correspondait principalement au vieux style russe de l’ancienne Byzance. Il avait d’ailleurs vécu ses années de jeunesse pendant la période où son père supervisait la reconstruction de l’ancien palais des tsars en un nouveau « Grand Palais ». Tout comme il l’avait vécu au Kremlin, Mikhaïl fit construire ses propres murs d’enceinte [illustration ci-dessous] et ses tours, séparés des autres bâtiments dédiés à l’église. En prônant de ce genre d’architecture parmi les édifices disséminés sur la propriété, l’idée principale était d’honorer les ancêtres et en particulier ceux de la famille des boyards Kolytchev, le plus représentatif d’entre eux, parmi les Saints Martyrs, étant le Saint Exarque Philippe, métropolite de Moscou.

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Vu de l’extérieur, la demeure [illustration ci-dessous : ruines datant de 1920] n’offrait rien de particulier. Elle possède deux étages et un grand hall qui fait face à la salle de réception.

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En face de la maison, il y avait un rond-point bordé d’arbres de haute taille. Au milieu, s’élevait un grand obélisque de pierre [illustration ci-dessous] sur lequel était apposé tous les noms des ancêtres du propriétaire du lieu.

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Reconstitution actuelle de l’ancienne demeure familiale (?)

Des planches à étagères étaient réparties sur plusieurs rangées. La plupart d’entre elles offraient aux visiteurs des périodiques russes allant de l’ancien « Russian Vivliofika » aux Capture d_écran 2017-08-05 à 09.18.21« Notes domestiques », sans oublier le « Messager Russe » datant d’une période plus récente. A l’extérieur, des copies en plâtre de bustes des dieux anciens et des héros de l’antiquité ainsi qu’une série de célébrités historiques étaient disposées dans une galerie. De l’autre côté de la maison, s’ouvrent les jardins. Immédiatement à gauche, derrière la clôture, se situent trois églises dédiées à Saint-Philippe [illustration ci-contre]. Conformément à la tradition chrétienne, une vaste crypte souterraine contient les tombes de la famille avec épitaphes, devant lesquelles brillent les flammes de lampes.
Les bâtiments ainsi que tout ce qui se trouvait sur la propriété de Mikhaïl L. avaient été érigés et décorés suivant des plans, dessins et schémas dont il avait inlassablement suivi l’exécution en observant de près le travail des maçons, des charpentiers et autres artisans. Faisant preuve d’un goût raffiné, il était un disciple accompli de l’école russo-byzantine en matière d’iconographie et d’ornementation ancienne. Le jardin s’étendait tout au long de la propriété. Entre deux étangs, un chemin étroit menait à un massif de chênes que Mikhaïl Lvovitch aimait particulièrement. Sous la couverture de sapins de haute taille, on apercevait la chapelle en pierre [illustration ci-dessous de 1920] dédiée à Saint-Philippe  où un office religieux avait habituellement lieu en l’honneur du Saint.

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Plus loin vers la droite, on atteint les limites du parc où coule un ruisseau du haut d’une élévation, passant par une chute d’eau vers un réservoir en forme d’une gigantesque coquille, appelée « Sainte Source ». Les gens des villages environnants venaient y boire de l’eau pour leur santé ou obtenir des guérisons. De plus, on avait depuis longtemps pris l’habitude d’y jeter des pièces de monnaie en cuivre.
En passant, je voudrais mentionner un autre événement qui se déroulait sur la propriété de Mikhaïl. Il était tout à son honneur car il se rattachait à sa profonde piété. Non loin de l’entrée, sur la route à gauche, en haut d’une forte montée, se trouvait une chapelle en bois, dotée d’une grande croix en bois également. Une légende locale l’entourait d’un certain mystère. Cette chapelle avait été construite par Mikhaïl et chaque année, le 14 septembre, une procession en l’honneur de l’Exaltation de la Sainte Croix s’y déroulait.
Je passe par tous ces détails afin que l’on puisse se faire une idée générale sur l’originalité de la propriété de Mikhaïl Lvovitch. C’était comme une mise en valeur des caractéristiques mystiques d’un cloître où tout est prévu pour charmer le pèlerin visiteur.
Mais j’imagine que votre opinion prendra une toute autre tournure lorsque j’aurai attiré votre attention sur la chose principale, épicentre de tous les éléments décrits ci-avant, symbolisant l’histoire des traditions familiales : les « Archives de la Famille des Boyards Kolytchev ». Elles se situaient dans un grand bâtiment [illustration ci-dessous], non loin de la demeure familiale, à droite. C’était un ensemble de trois pavillons, reliés l’un à l’autre, mais disposant chacun de son toit.

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Les diverses branches de l’arbre généalogique des boyards Kolytchev étaient reproduites sur les murs blancs du bâtiment des archives. Grimpant jusqu’au plafond, elles se déroulaient jusque sous les voûtes. Tout ce que Mikhaïl avait utilisé pour ses recherches y était exposé : livres, manuscrits, documents historiques, parchemins, mémoires de famille et bien d’autres. La correspondance de ses ancêtres, de son père et de sa mère ainsi qu’une collection de lettres qu’il avait reçues, subdivisés en plusieurs dossiers.
Dans l’un d’eux, il me montra trois notes que je lui avais fait parvenir en 1839 à Metcherskoïe. Trois lettres également : l’une de Naples à Moscou, une autre de Rome, datant toutes deux de 1840 et une troisième de Moscou à Saint Saint-Pétersbourg, de 1841. On peut s’imaginer mon émotion lorsque je me remis tout cela en mémoire, car au-delà de nos relations amicales, il avait été mon élève.
Le Musée est organisé par ordre chronologique, d’abord en ce qui concerne la famille Kolytchev, ensuite du côté des ancêtres de son père, le baron Lev Carlovitch. Bien au-delà de l’intérêt personnel de ces objets de famille, ces collections constituent un matériel très riche pour la compréhension de la vie de tous les jours, les costumes, les artefacts ainsi que les petits détails qui font la vie privée de la noblesse russe.
Des chemises brodées d’or ayant appartenu aux Kolytchev et datant du XVIIIème siècle, des boîtes en ivoire [illustration ci-dessous à Moscou, rue Povarskaïa] ornées de motifs mythologiques que l’un des boyards avait présenté à Pierre-le-Grand ; un jouet miniature en argent offert par un autre membre à l’impératrice Elizabeth ; une arbalète et une selle d’attelage, emmenées d’Alsace par le père de Lev Carlovitch, le baron Carl-Auguste, lorsque celui-ci s’enfuit vers la Russie pour se préserver de la guillottine.

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Certaines pièces de la collection appartiennent à une période plus récente. Elles ont pour moi un intérêt personnel tout particulier, comme par exemple des objets de toilettes, l’écritoire et des objets ayant appartenu à Nathalie et Catherine Lvovna (Bode), un rosaire, un livre de prière, un scapulaire et d’autres menus objets religieux en provenance de l’humble cellule de Maria Lvovna.

Souvenirs de Léon Soukhotine :

Malgré son origine à moitié étrangère, il était russe jusqu’au fond de l’âme. Mon père se rappelle comment une fois à table il se mit à critiquer le catholicisme. Alors, à l’autre bout de la table se fit entendre la voix de ma grand’mère : « Michel, n’oubliez pas que votre père était catholique ! » Mon grand-père évitait même de parler français.
Il avait un véritable culte pour tout ce qui appartenait aux Kolytcheff. Il entreprit de collectionner tout ce qui avait jadis appartenu à la famille Kolytcheff : objets, portraits, lettres, mémoires, papiers d’affaires. Toute cette grande collection se trouvait dans un musée spécial construit à Loukino tandis que les portraits pendaient aux murs des salons de réception. Près de la maison se trouvaient deux églises et le caveau de famille [illustration ci-dessous de 1920].

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Mon grand-père avait fait transporter dans ce caveau non seulement les corps de son père et de sa mère, mais de parents plus ou moins éloignés. Je me souviens que mon père racontait que mon grand-père était allé dans la petite ville de Riajsk pour en rapporter le corps de son grand-père Kolytcheff. Il rapportait ces ossements dans une valise dans un coupé de 1re classe. A une station, le cousin de ma grand’mère, Grégoire Tchertkoff, monta dans le coupé occupé par mon grand-père. « Eh bien Gricha, dit mon grand-père, assieds-toi et tâche de deviner ce que j’ai dans cette valise. Pour rien au monde tu ne le découvriras » …
Je n’ai été qu’une seule fois à Loukino du vivant de mon grand-père. Après sa mort, je suis allé plusieurs fois voir ma grand’mère qui survécut de 10 ans à son mari. Ma grand’mère avait une adoration pour ma mère et m’aimait aussi beaucoup et était toujours heureuse de me faire des cadeaux. Une fois elle me permit de choisir dans le musée ce qui me plaisait parmi les objets ayant appartenus aux Kolitcheff. Je me rappelle avoir choisi une canne d’ébène avec un pommeau orné de grenades. Je ne me souviens plus à quelle époque je reçus encore de ce musée une rapière des Kolitcheff, avec « vivat Catharina » [illustration ci-dessous] gravé sur la lame.

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Comme à cette époque les étudiants de l’université de Moscou portaient des rapières dans les grandes occasions, je la portais tout le temps que je fus étudiant, et elle excitait toujours l’intérêt non seulement de mes camarades, mais de tout le monde.
Parmi les cadeaux de ma grand’mère, j’ai conservé jusqu’à aujourd’hui la montre en or [illustration ci-dessous] qui avait appartenu à mon grand-père, avec une chaine en or (morceau de la longue chaine à laquelle était attachée la montre qu’il portait en sautoir).

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Dans la tourmente des événements révolutionnaires et de la guerre civile, le domaine de Luchino aura fort souffert. Un manuscrit russe intitulé « Domaines de la Couronne » d’Alexeï Grech, publié en 1932 dans l’anthologie « Les monuments de la Patrie », nous révèle que « les Gardes Rouges avaient traversé à cheval les pièces du palais d’Oranienbaum en fracassant la célèbre porcelaine de Saxe et les assiettes anciennes à l’aide de leurs crosses de fusils … tout comme à Luchino ils avaient jetés les restes abîmés des barons de Bode en dehors de la crypte … »

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Capture d_écran 2017-08-05 à 10.28.55Si certains bâtiments ont pu être conservés comme l’église de la Transfiguration [illustration ci-dessus de 1920], la clôture, l’étang et les allées, la chapelle dédiée à Saint-Philippe ainsi que le caveau de famille seront entièrement détruits. L’église sera fermée un temps en 1930 mais sans subir de dommage. Elle est autorisée à réouvrir en 1949 et est ensuite incluse dans le domaine de la résidence [illustration ci-contre], du Patriarche de Moscou. En 1888, à la mort de Michel, la propriété passe à sa femme Alexandra. Leur fille Nathalie Sollogub sera la dernière propriétaire de Luchino avant la révolution bolchevique de 1917.

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Rassemblement familial à Luchino dans les années 1880 – de g. à d. : serviteur en livrée ; princesse Hélène Viazemski, née Komarovski, première épouse du neveu du poète Viazemski ; Michel de Bode-Kolytchev, assis et paralysé par suite d’une attaque cérébrale ; Augustin de Bode, petit-fils de Clément de Bode, qui sera attaché militaire aux Etats-Unis avant la guerre 14-18 ; Alexandrine Tcherkov, épouse de Michel de Bode ; Agathe, fille de Pierre Yazekov, infirmière s’occupant de Michel de Bode ; Catherine Stoïkovitch, réfugiée serbe de la guerre de 1877 ; Kaznietcheva, « pauvre noble » ; Elisabeth, soeur d’Augustin de Bode ; serviteur en livrée.

Au décès de Dimitri Vassiliévitch Kolytchev (1866), dernier du nom, Michel est autorisé par oukase impérial du 13.5.1875 de porter le nom et les armes des Kolytchev , pour lui et toute sa descendance, en réversion du nom de sa mère, née Natalia Fedorovna Kolytchev.

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à g. : armoiries Bode-Kolytchev – milieu : armoiries Kolytchev – à d. : bouton armorié

Après avoir été page à la cour impériale de 1832 à 1843, Michel se met au service de son père au greffe du Tribunal. Le 29 septembre 1856, il est nommé directeur adjoint du Palais des Armures [illustration ci-dessous]. En 1865-1883, il est vice-président de la Commission pour la construction de la cathédrale du Christ Sauveur à Moscou, que Staline fera dynamiter après la Révolution bolchevique. [illustration ci-dessous].

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En 1856, à l’occasion du couronnement du nouveau tsar Alexandre II, Michel Lvovitch de Bode est cité en tant que « Maître de Cérémonie » dans le Recueil officiel décrivant le « Couronnement de Leurs Majestés l’Empereur Alexandre II et de l’Impératrice Maria Alexandrovna », paru à Moscou en versions russe et française (Описание Священнейшего Коронования Императорских Величеств Государя Императора Александра Второго и Государыни Императрицы Марии Александровны Всея Руси). On pourrait imaginer pouvoir le localiser sur le tableau ci-dessous …

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Le carton d’invitation ci-dessous, signé de la main du « baron Bode », est établi au nom de Vladimir Nikolaevitch Okhotnikov (1847-1917), sénateur et membre du Conseil d’Etat, à l’occasion du couronnement au palais du Kremlin de Leurs Majestés Impériales le tsar Nicolas II et son épouse Alexandra Fedorovna. Alors que Michel de Bode, maître de cérémonie en 1856, est décédé en 1888, de quel baron de Bode s’agit-il ?

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Suite des Souvenirs de Fedor Bouslaev, précepteur des enfants de Lev Carlovitch :

Capture d_écran 2017-08-05 à 09.22.40En 1888, le vendredi 18 mars, je reçus de la princesse Anna Lvovna un mot qui me frappa de stupeur comme un coup de tonnerre. Elle m’écrivait : « Mon cher Fedor Ivanovitch, votre étudiant et ami est sérieusement malade. Mercredi, il assistait aux funérailles de la comtesse Maria Fedorovna Sollogub [illustration ci-contre, belle-mère de Nathalie de Bode, fille de Michel Lvovitch] qu’il appréciait énormément. Fatigué et énervé, il est subitement tombé malade. Il l’est encore et ne récupère pas. C’est tellement triste, il n’y a pas de mot pour décrire ce genre de choses. » La situation resta inchangée. Le mardi 22 mars, Mikhaïl Lvovitch Bode décéda sans avoir souffert, doucement et paisiblement comme s’il était plongé dans un rêve … »

x Alexandra Ivanovna Tchertkov
° 16.6.1827 + 5.1.1898
Fille d’Ivan Dmitrié­vitch Tchertkov, directeur des Haras impériaux, et de la baronne Hélène Grigorievna Stroganov ; demoiselle d’honneur de l’Impératrice Alexandra Fedorovna. Elle avait en 1860, 130 serfs sur 2.300 ha à Tovol’no, district d’Ostrogojsk. En 1900, 1641 ha à Sredné-Voskresenskaïa, district d’Ostrogojsk.

Souvenirs de Léon Soukhotine :

Dans les années 1840, Michel Lvovitch rencontra à Moscou Ivan Tchertkoff qui avait alors près de 50 ans. Probablement plût-il à celui-ci qui conçut l’idée de lui donner en mariage sa fille aînée qui avait été élevée chez son grand-père Stroganoff à Saint-Pétersbourg. Cette idée dut plaire à mon grand-père. Tchertkoff l’envoya à St. Pétersbourg, muni d’une lettre d’introduction. Je me rappelle avoir lu la lettre avec laquelle Léon Bodé s’adressait au comte Stroganoff en lui demandant la main de sa petite-fille pour son fils Michel. Ma grand-mère ne put s’empêcher de tomber amoureuse de ce beau charmeur de Moscou qui probablement feignit d’en être amoureux également. Le mariage dût avoir lieu à St. Pétersbourg.

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Elle n’était pas belle [illustration ci-dessus : à gauche, avec sa soeur Sophie (1832-1837) – à droite, âgée à Luchino], pas de haute taille, d’une tournure peu élégante. Il est vrai que ses yeux bleus étaient grands et beaux, mais le nez n’était pas beau avec de larges narines. Elle ressemblait à son grand-père, le comte Stroganoff. Elle était pieuse, de règles austères, très bien éduquée, très intelligente. Elle n’avait jamais vécu à la campagne et ne connaissait pas la vie de campagne. Pour la première fois de sa vie, elle vit un cochon après son mariage quand elle se rendit en voiture avec son mari après la cérémonie nuptiale à la propriété des Bodé.
Ma grand’mère reçut une très belle dot, c’était la dot de sa mère en entier, près de 800.000 roubles. Cette somme, très grosse à cette époque, fut employée par mon grand-père en partie à acheter une magnifique maison à Moscou [illustration ci-dessous]. Ensuite mon grand-père acheta une petite propriété aux portes de Moscou, Loukino, et y entreprit de grands embellissements. »

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Selon la tradition, cet hôtel particulier aurait servi de modèle à Léon Tolstoï pour la demeure de la famille Rostov dans son roman « Guerre et Paix », d’où son nom familier de « Maison des Rostov » ou « Дом Pостовых ».

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Capture d_écran 2017-08-05 à 09.23.32Selon un historien russe, Léon Tolstoï, rencontrant Michel de Bode au Club Anglais à Moscou, lui aurait demandé s’il ne voyait pas d’inconvénient à ce qu’il prenne sa demeure comme modèle pour son nouveau roman « Guerre et Paix ». « Absolument pas », avait répondu le baron, « j’en serais très fier ! ».
Toujours selon cet historien, l’écrivain aurait pris la maison Bode comme modèle pour la demeure de la famille Rostov, non pas tant pour elle-même mais surtout pour l’attachement qu’il portait à la famille Bode, l’atmosphère chaleureuse qui y régnait, animée par Michel Bode et son épouse Alexandra Tcherkov. Lorsque Tolstoï entama l’écriture de son roman en 1863, Nathalie de Bode, fille de Michel (future épouse Sollogoub), n’avait que douze ans. Elle pourrait être la Natacha Rostov …
Anecdote surprenante de l’histoire : Lisa Soukhotine, arrière-arrière-petite-fille de Michel de Bode, aura été la dernière épouse de l’acteur Mel Ferrer qui joua en son temps dans le film « Guerre et Paix » le rôle du prince Bolkonsky, alias Nicolas Volkonsky, grand-père de Léon Tolstoï. L’épilogue du film est connue : Bolkonsky-Ferrer tombera amoureux de l’héroïne du roman, la belle Natacha Rostov, à la ville Audrey Hepburn qui sera aussi son épouse !
En 1812, des militaires français occuperont la maison durant un mois environ, après l’entrée dans Moscou des armées de Napoléon, ce qui la préservera des incendies de la capitale. Pour commémorer le 100ème anniversaire de la « Guerre Patriotique » de 1812, un film muet est tourné en 1912 à l’aide de comédiens de théâtre. Une séquence illustrant l’appel du 1er septembre 1812 par le comte Rostopchine [illustration ci-dessous] au peuple à « défendre le coeur de la Russie » est tournée au palais Bode.

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En commémoration de la maison Rostov du roman « Guerre et Paix », une statue de Léon Tolstoï a été placée en 1956.

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Photo avec les portraits de Lev Carlovitch de Bode et de son fils Michel Lvovitch

1.1.5.(b).11.2.8.7.1. baron Michel Mikhaïlovitch de Bode-Kolytchev
° 1849 + 10.7.1849 Moscou

1.1.5.(b).11.2.8.7.2. baronne Nathalie Mikhaïlovna de Bode-Kolytchev
° 17.7.1851 + 3.7.1916 Moscou
Ancienne demoiselle d’honneur de l’Impératrice Marie Alexandrovna. Considérée à l’époque comme « l’une des beautés de Moscou », très fière de ses racines familiales remontant à Guillaume-le-Conquérant, le snobisme de Nathalie n’aura pas laissé d’excellents souvenirs dans sa propre famille !

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Souvenirs de Léon Soukhotine :

Comme nous étions souvent invités à des bals d’enfants, maman décida au courant de l’hiver de donner aussi un bal. Mais notre appartement (à Moscou) n’était pas assez grand, ma mère pria sa soeur, tante Natacha Sollogoub, de lui céder la maison pour l’occasion, toutes nos connaissances étant les mêmes que celles de ma tante.
Plusieurs années s’étaient déjà écoulées depuis la mort de mon grand-père et on avait pas encore procédé au partage de l’héritage. Tante Natacha habitait l’immense et magnifique maison, tandis que nous avions dû prendre un appartement pour l’hiver.

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Il n’y eut qu’un dissentiment quant aux personnes que maman voulait inviter. C’était la famille des Loutchinine qui venait de se fixer à Moscou. M.L. était très riche et sa femme était une Française de très bonne famille. Tante Natacha ne les trouvait pas assez aristocratiques. Ils avaient deux filles, j’aimais danser avec la cadette qui avait mon âge. En dansant, nous causions du latin, de l’histoire romaine, de littérature. Nous eûmes beaucoup de peine à convaincre tante Natacha, mais enfin on décida de les inviter.

Souvenirs d’Hélène Bazilevski, femme de Léon (Déda) Soukhotine :

Ensuite, je dus être présentée à la tante de Déda, comtesse Nathalie Sollogoub. Je savais qu’elle était très snob et aurait voulu que Déda épousât une jeune fille ayant plus de quartiers de noblesse que je n’en avais. La généalogie des Bazilevsky ne remontait pas si loin que la généalogie des Soukhotine et des Bode surtout qui descendaient d’une famille anglaise du temps de Guillaume-le-Conquérant. Mes parents connaissaient la tante de Déda chez laquelle il vivait quand il venait de Kotchety à Moscou. Quant à moi, je ne l’avais jamais vue. Je savais aussi que quand Déda lui avait dit qu’il allait se marier, elle lui avait dit : « J’espère que ce n’est pas la petite Bazilevsky que tu épouses ! » On peut s’imaginer mon émoi quand j’entrais dans le salon où siégeait tante Natacha ! C’était son jour de réception. Après m’avoir dit bonjour, elle me pria de me mettre au milieu de son salon et braqua sur moi son lorgnon. « Tournez maintenant », me dit-elle. Après m’avoir examinée sous toutes mes faces, elle dit avec condescendance : « Pas mal la petite ». Ensuite, nous devînmes de bonnes amies mais j’avais toujours un peu peur d’elle !

Федор Львович Сологубx 4.2.1873 comte Fedor Lvovitch Sollogub
° 9.2.1848 + 29.10.1890 enterré au monastère de Donskoï
Fils du comte Léon Alexandrovitch Sollogub et de Marie Samarine. Diplômé de l’université de Moscou, il a principalement été actif dans le monde du théâtre comme acteur, peintre et poète amateur. A l’aide de croquis et de dessins, il fabriquait des costumes et des accessoires pour les théâtres impériaux ainsi que certains théâtres privés. « C’était un homme très doué, dilettante, poète et peintre, beaucoup d’humour et de charme », disait l’un de ses proches. Il était un familier de Léon Tolstoï à qui il demandait son avis sur la présentation de ses spectacles de théâtre.

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Hamlet – croquis de la scénographie et conception des costumes

1.1.5.(b).11.2.8.7.2.1. comtesse Hélène Fedorovna Sollogub
° 3.1.1874 + 13.7.1935 Moscou

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Hélène avec sa soeur Vera

Demoiselle d’honneur (sp). Hélène Sollogub est inscrite pour l’année 1907-1908 comme étudiante en médecine à l’université de Lausanne [illustration ci-dessous], en même temps que son cousin Serge Soukhotine.

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Ci-dessous, photo inédite datant de 1901-1902, illustrant une visite des Sollogub du 52 de la rue Povarskaïa à leurs voisins Samarine, cousins par alliance, résidant au 38 de la même rue Povarskaïa.

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De g. à d. : Georges et Pierre Samarine ; Hélène et sa soeur Vera, assises (à gauche) de leur mère Nathalie Sollogub ; debout avec un chapeau, Léon Mikhaïlovitch Soukhotine et sa soeur Nathalie Mikhaïlovna Soukhotine (à droite de la photo).

Selon certaines rumeurs qui ont couru à son propos, on a dit d’elle qu’elle « aimait beaucoup les serpents, les portant même parfois autour du cou. » Elle aurait fait aménager un enclos dans le parc de sa propriété où une humidité constante était maintenue sous de larges plantes, créant ainsi un milieu de vie favorable pour ses serpents …
Soupçonnée d’avoir caché des bijoux quelque part dans son jardin, Elena aurait également connu un certain temps la sinistre prison de Butyrskaïa [illustration ci-dessous]. Les bijoux n’ont bien sûr jamais été retrouvés !

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On lit également qu’après la Révolution d’Octobre, certains tableaux de maître auront été « transférés » de la maison familiale de la rue Povarskaïa vers un musée appelé « Fonds National » à Moscou (национального музейного фонда). Il s’agirait entre autres de trois tableaux d’artistes hollandais inconnus du 17ème siècle, dénommés « Vision », « Odeur » et « Ripaille dans une Taverne », et un album de gravures de Salvator Rosa, l’artiste préféré de Mary de Bode, ainsi que seize boîtes avec médaillons. Il y aurait également un portrait du général Piotr Kornilovitch Suchtelen (1788-1836) [illustration similaire (?) à celle ci-dessous, exposé dans la Galerie des Généraux de l’Ermitage]. Il était le père de Paul, [illustration ci-dessous de gauche], compagnon d’armes de Lev Carlovitch Bode durant ses années de guerre.

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1.1.5.(b).11.2.8.7.2.2. comtesse Vera Fedorovna Sollogub

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x Serge Fedorovitch Levchine
° 24.3.1873 + 21.2.1923
Capitaine de frégate de l’équipage de la Garde.

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« Vera Sollogub and Sergei F. Levshin had three sons : Fedor, Alex and Michael. In 1921 they two sons arrived in Yugoslavia, where he was listed in the lists of naval officers, after arriving in Yugoslavia (at the end of December 1921. The their family was recorded as : Levshin Sergey Fedorovich, captain 2nd rank, retired, wife Vera, sons : Fedor, Alex. Another son Michael (1916-1920), died during the epidemic earlier. »

1.1.5.(b).11.2.8.7.2.2.1. Fedor Sergueïvitch Levchine
° 1908 + 1.2000
x 1949 Buenos Aires Tatiana Igorovna Wolodimeroff
° 1924
« ont vécu 10 ans en Argentine à Buenos Aires, depuis 1958 en Californie ». 

Capture d_écran 2017-08-05 à 11.55.11Between 1882 and 1960 arrived to the port of Buenos Aires, main port of Argentina, 2.313 ships transporting new immigrant to these lands of peace. Some of them hoping to find new opportunities to work and progress. Others escaping the European wars.

1.1.5.(b).11.2.8.7.2.2.1.1. Vera Fedorovna Levchine
° 1952 Buenos-Aires
x Jeff Williams
Capture d_écran 2017-08-05 à 11.12.26Jeff Williams was a journalist in Asia for 10 years, from 1962 to 1972, covering news that ranged from the overthrow of Indonesias President Sukarno to the Vietnam War. He was first an Associated Press correspondent and then became a CBS News correspondent. In 1970, he was the only American journalist in Cambodia when a right-wing coup d’état toppled chief of state Prince Norodom Sihanouk. Williams covered the expanding war there in which 25 foreign newsmen were killed in less than six months. In 1972 Williams was reassigned to the CBS News bureau in Chicago. From there he covered the Mid-West, including the American Indian Movement takeover of Wounded Knee.
He is the author of two novels, a history of the Portuguese colony of Macao, and co-author of the published history of Cambodia in 1970, entitled « A Cambodian Odyssey » and the deaths of 25 journalists. He lives with his wife and children in the San Francisco Bay Area.

1.1.5.(b).11.2.8.7.2.2.1.1.1 Theodore (Theo) Williams
° 1.1990

1.1.5.(b).11.2.8.7.2.2.1.1.2. Ian Nikolai Williams
° 10.1992

1.1.5.(b).11.2.8.7.2.2.2. Alexeï Sergueïvitch Levchine
° 1911
x Waltraut Lukoshat (sp)

1.1.5.(b).11.2.8.7.2.2.3. Michael Sergueïvitch Levchine
° 1916 + 1920 died during the epidemic earlier

1.1.5.(b).11.2.8.7.3. baronne Hélène Mikhaïlovna de Bode-Kolytchev
° + 1853
Ses funérailles ont eu lieu en l’église Saint-Philippe à Luchino

1.1.5.(b).11.2.8.7.4. baronne Marie Mikhaïlovna de Bode-Kolytchev
Capture d_écran 2017-08-05 à 11.12.41° 9.3.1856 Moscou + 5.1.1898 décédée de la tuberculose
Ancienne demoiselle d’honneur de S.M. l’Impératrice Marie Fedorovna [photo ci-contre]

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Souvenirs de son fils aîné Léon Soukhotine à propos du décès de sa mère :

Durant les dix premières années de ma vie, nous passions toujours de sept à huit mois à Kotchety. Quant aux hivers, nous en avons passé deux à l’étranger, deux en Crimée, un à Kotchety et les autres hivers à Moscou dans la maison de mon grand-père, le baron de Bode. C’est à cause de la santé de ma mère que nous avons été obligés de passer deux hivers de suite à l’étranger. J’avais alors entre cinq et six ans. La première fois, Maman pris avec nous Natacha et moi. Nous passâmes cet hiver à Méran (Tyrol). L’hiver suivant, ma mère ne prit que moi avec elle et nous passâmes cet hiver à Montreux et ensuite à Méran.

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(…) Le matin, on nous fit tous lever et aller dans la chambre de notre mère. Maman respirait avec peine et répétait tout le temps « je … je … je … ». Il me semblait qu’elle voulait dire « je vais mourir ». Mais quelque temps après, elle se calma. Elle nous fit signe à tous de sortir et resta seule avec mon père. Elle lui dit entre autres qu’elle avait senti qu’elle mourait mais que quelqu’un ou quelque chose l’en avait empêchée. Elle pria d’envoyer chercher un prêtre, son confesseur, qui habitait assez loin. Le prêtre arriva en une heure et demi. Elle se confessa et communia. Il était onze heures du matin. Alors l’agonie commença. On nous fit tous venir auprès d’elle, nous lui dîmes adieu et elle s’éteignit doucement …

Souvenirs de son petit-fils Serge Obolensky :

Un jour, regardant avec maman de vieilles photographies, je suis tombé sur celle d’un prêtre. Derrière, il était écrit de la main de notre grand-mère Marie Soukhotine : « Archiprêtre N. qui m’a baptisée, a béni mon mariage et fut pendant 35 ans mon père spirituel. Que l’on ne me dise donc pas que les dames russes « du grand monde » ne voulaient pas se confesser à un prêtre marié, car notre grand-mère, fille du baron Michel de Bode, dame d’honneur (Freiin) de l’impératrice Marie, était de ce « grand monde », et un archiprêtre de Moscou était nécessairement marié (sinon il serait « hiéromoine » ou « archimandrite »).

x 27.4.1877 Michel Sergueïvitch Soukhotine [photo ci-dessous]
° 1.1.1850 Moscou + 8.8.1914 Kotchety
Licencié en philologie à l’université de Moscou ; depuis 1877, gentilhomme à la Cour. Maréchal de la Noblesse de Novosil en 1885-1900, conseiller d’Etat 1894, conseiller d’Etat actuel 1896, membre de la Douma de Russie 1906. Il avait en 1877 1.209 hectares à Kotchety d. Novolsil et hérita, en commun avec son frère Sergueï, de leur père 751 hectares à Kozlova d. Efremov. En 1900, il avait à Kotchety 600 hectares. Epouse en secondes noces, le 14.10.1899, la comtesse Tatiana Lvovna Tolstoï, fille de l’écrivain.

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Sacha Tolstoï relate dans ses Souvenirs que sa soeur Tania [illustration ci-desssus], au décès de Marie, ressentit les « affres de sa conscience ». Se sentant coupable envers elle-même, elle était prête à interrompre toutes relations avec Michel Soukhotine qui l’avait, alors que sa propre femme était encore en vie, entretenu de l’amour qu’il lui portait, alors même qu’elle ne l’avait jamais autorisé à l’embrasser …

Souvenirs de Serge Obolensky :

Michel S. Soukhotine s’était remarié avec Tatiana Lvovna Tolstoï, fille aînée de l’écrivain, qui avait alors 35 ans. Je crois que ce remariage ne fut pas très bien vu par les (enfants) Soukhotine. Maman m’avait expliqué qu’ils n’ont jamais voulu appeler Tatiana Lvovna « mama » (mot en russe) et qu’il y eut un compromis : on décida qu’elle serait « maman » en français. Ce « maman » en français n’était pas du tout un refus ou un rejet quelconque, mais une différence marquée et maintenue pour toujours par les enfants du premier lit. A tout ceci, il y avait des raisons qui ont sans doute joué leur rôle dans la formation du caractère de maman, lui conférant une fermeté et un sens de responsabilité remarquable. Je pense que c’est Tatiana Lvovna qui m’a expliqué bien plus tard que le dernier frère de maman, Dorik (Théodore) n’était pas le fils de notre grand-père, ce qui explique pourquoi on nous disait toujours que maman avait du s’occuper très jeune de son frère cadet « orphelin ». Le mot « orphelin » était toujours souligné, il s’est bien imprimé dans ma mémoire. D’autre part, notre grand-père n’était pas un mari très fidèle. Un jour, il fut obligé de dire à son fils Serge qu’il ne devait pas épouser une jeune fille voisine car elle était sa demi-soeur !

De l’avis de certains proches, les relations entre Michel Sergueïevitch et sa femme Marie Mikhaïlovna étaient loin d’être parfaites. Leur union n’aurait pas été heureuse, Michel manifestant peu d’intérêt envers son épouse, préférant passer la plupart de son temps à la chasse. En outre, il accompagnait rarement sa famille lorsque sa femme se rendait à l’étranger pour son traitement … En dépit de cette situation, il ne fut jamais question de séparation ou de divorce, Michel ayant très mal vécu le scandale du divorce de ses parents.
On se souvient que sa mère, née Maria Alexeïevna Diakov [photo ci-dessous avec son fils Michel], divorça avec fracas pour se remarier avec Serge Alexandrovitch Lodyjensky et fut le modèle d’Anna Karénine du roman éponyme de Léon Tolstoï !

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.1. Marie Mikhaïlovna Soukhotine
° 1878 + 7.13.1881

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.2. Léon Mikhaïlovitch Soukhotine
° 24.12.1879 Loukino + 1.6.1948 Bruxelles
x 1905 Hélène Pétrovna Bazilevski
° 16.9.1885 Tsarkoïe Selo + 4.6.1958 Bruxelles

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Extraits des Souvenirs de Léon Soukhotine :

Après avoir terminé mes études à l’Université, je décidai de me marier ; j’avais fait la cour à plusieurs jeunes filles à Moscou mais n’avais pas encore songé au mariage. Au commencement de l’hiver 1904, j’avais commencé à faire la cour à Hélène Basilevsky qui me plaisait beaucoup. Mais au printemps 1904, en revenant de Rome où j’étais aller passer quelque temps avec mon père, mes frères et ma soeur, j’appris qu’elle s’était fiancée à mon cousin, Dmitri Diakov.
Les fiançailles ne durèrent pas longtemps et au milieu de l’été, elle les rompit. Je passai l’automne et l’hiver suivant à Kotchéty mais je venais de temps en temps à Moscou et rencontrai souvent Liolia qui me plaisait de plus en plus et que je désirais épouser. Au mois de février [le 13 !] nous nous fiançâmes. Notre mariage eut lieu le 6 mai 1905.
Après quoi nous fîmes un merveilleux voyage de noces. D’abord, nous allâmes à Abazzia, ensuite à Florence. Puis Rome et ensuite Naples où nous apprîmes le terrible désastre de Zu-Sima où presque toute la flotte russe avait été détruite par les Japonais. La guerre japonaise n’était pas encore terminée. Cette nouvelle assombrit notre beau voyage. De Naples, nous passâmes à Brindisi d’où nous prîmes le bateau pour aller en Grèce, d’abord à Olympie que je désirais spécialement visiter pour me rendre compte du décor dans lequel se passaient les jeux olympiques. Nous passâmes quelques jours à Athènes, cette ville merveilleuse, et ensuite nous prîmes le bateau pour Constantinople. La vue de Constantinople, de la Corne d’Or qui s’ouvre devant vous quand vous approchez de Constantinople est inoubliable. Quelques jours après, nous prîmes un bateau russe qui devait nous conduire à Odessa. Mais nous ne pûmes aller à Odessa – l’équipage du cuirassé Potemkine s’était mutiné [illustration ci-desssous] et on ne pouvait débarquer à Odessa. C’était le premier signe précurseur de la révolution russe.

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Extraits des Souvenirs d’Hélène Soukhotine :

Kotchéty ! Quand j’étais fiancée, Liova m’avait tant parlé de Kotchéty, le vieux nid héréditaire des Soukhotine, appartenant à la famille depuis près de 500 ans, de son immense parc avec des chênes séculaires. Je savais comme Déda aimait Kotchéty et il voulait que je l’aime aussi.
Enfin, le train s’arrête à la petite gare de Blagodatnaya. Mon coeur bat. Voilà mon beau-père qui est venu nous attendre à la gare. « Eh bien, Pétrovna, bonjour ! » Il me semble encore entendre sa voix caressante et un peu railleuse. Nous prenons place dans une grande calèche, attelée de quatre chevaux. Il y a 12 kms de la gare jusqu’à Kotchéty. Le vieux cocher Maxime se retourne et me regarde avec curiosité – et nous partons ! Mon mari et mon beau-père s’engagent tout de suite dans une conversation concernant les terres, la récolte, comme s’ils s’étaient quittés la veille, comme si ce grand événement qui avait changé toute ma vie n’était pas arrivé !! Leur conversation roule sur des sujets qui ne m’intéressent pas ; le trèfle n’a pas réussi cette année, il y a eu dernièrement une grêle terrible qui a causé de grands ravages, les grêlons étaient gros comme des oeufs de pigeon.
Je n’écoute que d’une oreille. Ils parlent et moi je regarde les blés qui ondulent, le large horizon qui s’ouvre devant nos yeux et je respire l’air de la belle soirée d’été. Un peu plus loin, nous longeons l’immense forêt de Lomtzy où il y a des loups même en été. Une descente rapide, un petit pont branlant et les chevaux partent au galop pour remonter la côte [illustration actuelle]. Voici l’église [aujourd’hui en ruine], notre paroisse. Nous sommes déjà à mi-chemin (…).

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Maintenant, nous longeons le parc de Kotchéty, puis un espace découvert, derrière la palissade on voit la maison ; la voiture tourne à droite et s’arrête devant le perron. Mon Dieu, que de monde ! Je suis myope, je distingue mal les visages et me sens tellement confuse ! Mais cela ne dure qu’un moment. On m’entoure, on m’embrasse, que de visages réjouis et heureux. La vieille Niania est là aussi, Anna Ivanovna, l’infirmière du village et amie de la maison, le cuisinier ; Vera Alexeïevna, l’économe et femme de charge, Yegor Ivanovitch, domestique depuis 25 ans dans la maison. Au-dessus de la porte d’entrée, on a fait un grand arc fleuri, on nous mène dans la dépendance de la maison qui sera dorénavent notre demeure. Une nouvelle vie commence pour moi. Que de bonheur et de joie nous attendent. Mais surtout, Liova est là avec moi avec ses grands yeux bleus si purs et son visage pâle et sérieux (…).

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.2.1. Micha Lvovitch Soukhotine
° 20.8.1906 + + 7.7.1963 Bruxelles (enterré 10.7.63 au cimetière de Verrewinkel-Uccle)
Enfance en Russie de 1906 à 1920 ; réfugié à Belgrade de 1920 à 1924 ; arrivée en Belgique en 1924.

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Micha enfant à Kotchety & jeune homme en 1925

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de g. à d. : Tatiana Tolstoï, seconde épouse de Michel Soukhotine – Dorik et Serge Soukhotine – Léon Tolstoï recevant un bouquet de fleurs de Micha et Tania, fille de Tatiana, tous deux vus de dos – photo datant de 1909

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A Kotchéty : Micha Soukhotine, petit-fils issu du 1er mariage de Michel S. Soukhotine
et Tania Soukhotine, petite-fille issue du 2nd mariage de Michel S. Soukhotine

Souvenirs de son père Léon Soukhotine :

Capture d_écran 2017-08-05 à 11.14.47Nous vivions tranquilles et heureux et ne nous doutions pas qu’un nouveau malheur nous attendait. Mika avait quatre ans et se portait bien. La seule chose qui nous inquiétait un peu, c’est qu’il se fatiguait beaucoup à la promenade et demandait à s’asseoir chaque fois qu’il voyait un banc. Un soir en rentrant du théâtre, je vis de la lumière dans la chambre de Mika. Mon coeur se serra. Je courus à sa chambre. Mika était debout dans son lit et sanglotait à fendre le coeur. On ne pouvait pas le toucher et même quand on effleurait son lit, il se mettait à hurler de douleur.
Petit à petit, il se calma et s’endormit. Le lendemain matin, nous fîmes venir de le médecin. Il conseilla de faire une radiographie de la jambe. Il pensait que ce n’était que des rhumatismes infantiles. Nous nous adressâmes alors à un célèbre chirurgien qui constata que le mal était dans le col du fémur. Alors commença le martyr du pauvre enfant. On le coucha tout à plat sur son lit, sans coussin sur la tête. Son lit était surélevé et un poids devait être attaché à la jambe malade. Il s’habitua assez vite à cette position peu commode. On lui avait fait une table en travers de son lit pour qu’il puisse jouer. Les enfants s’habituent vite à tout et donc trois jours après, il jouait toute la journée, faisait des constructions avec des cubes et ne se plaignait de rien. Seulement, il ne fallait pas toucher à son lit – il commençait alors à pleurer.
Au bout de deux semaines, quand il ne souffrait plus, nous le portâmes à la clinique de Postnikof. Je le portais étendu sur mes bras et devais tenir sa jambe malade en la tirant un peu. Alors, nous nous adressâmes au célèbre chirurgien Postnikof qui constata que c’était une coxalgie. Il fallut le mettre dans un plâtre et le médecin nous conseilla d’aller au midi de la France, il pensait que Mika pourrait guérir mais qu’il resterait boiteux. Notre décision fut vite prise : trois jours après nous partîmes pour Paris où nous fîmes venir Ménard qui nous inspira une telle confiance que deux jours après, nous partîmes pour Berck-Plage où Mika fut opéré le surlendemain de notre arrivée. Après l’opération, Ménard nous dit que l’opération avait réussi, que l’os de la jambe n’était pas encore touché et qu’il guérirait et ne boiterait pas.
Le lendemain, Mika se sentait tout à fait bien. Alors, commença notre vie à Berck-Plage (1911). Mika, avec un plâtre sur la jambe opérée, était couché sur une gouttière. Tout à Berck était organisé pour les malades. On pouvait les transporter partout sur leurs gouttières. Les malades avaient chacun leur petite voiture attelée d’un âne [photo de Mika ci-dessous] et on allait pour toute la journée sur la plage, par tous les temps, la pluie et le vent.

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En automne, on enleva le plâtre de la jambe de Mika et on lui mit un appareil qui lui permettait de plier le genou ; on lui permit même de marcher avec des béquilles cinq minutes, deux fois par jour. Je me souviens de sa joie quand il fit ses premiers pas. Ménard nous conseilla d’aller passer l’hiver en Suisse. Au courant de l’hiver, toute la famille Soukhotine vinrent nous voir et passer quelque temps avec nous. Au printemps, nous revînmes à Berck-Plage. Ménard enleva l’appareil, ôta les béquilles et lui dit de marcher. Je le vois, faisant ses premiers pas d’une démarche peu assurée. Ce fut une joie inoubliable pour nous tous !

x (a) 1926 (div 1927) Nelly Van de Velde
° 1907
x (b) 1935 Anne-Marie Catherine (Kate) Beliën [illustration ci-dessous]
° 26.9.1911 + 1980

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.2.1.(a).1. Hélène Mikhaïlovna Soukhotine
° 21.12.1926 + ?
x 6.1965 Marcel (Nick) Clerbois
° 1909 + 1960
x 1963 (div 1965) John Douglas Cox the Third

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.2.1.(b).2. Elisabeth (Lisa) Mikhaïlovna Soukhotine
° 6.7.1936 Bruxelles + 28.6.2013 Santa Barbara (Californie)
Certains quartiers de son pedigree familial feraient pâlir les âmes prudes : Grigori Potemkine, prince, amant et grand favori de Catherine II de Russie ; le décembriste Vassily Davydoff, exilé en Sibérie après sa participation au complot avorté de décembre 1825 contre le nouveau tsar Nicolas Ier ; son grand-oncle Serge Soukhotine, coauteur dans l’assassinat de Raspoutine. [illustration ci-dessous de gauche à droite]

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Lisa Soukhotine aura été la dernière épouse de feu Mel Ferrer qui joua en son temps dans le film « Guerre et Paix » le rôle du prince Bolkonsky, alias Nicolas Volkonsky, grand-père de Léon Tolstoï. Pour le clin-d’oeil anecdotique, on connait l’épilogue du film : Bolkonsky-Ferrer tombe amoureux de l’héroïne du roman, la belle Natacha Rostov, à la ville Audrey Hepburn … qui sera aussi son épouse.
x 1971 Paris Mel Ferrer
° 25.8.1917 Elberon + 2.6.2008 Santa Barbara
Incontournable figure du cinéma hollywoodien des années 1950 et 60, il a brillé dans de nombreux films d’époque dont « Scaramouche », « Les Chevaliers de la Table ronde », « Guerre et Paix », « Le Jour le plus long » ou « La Chute de l’Empire romain ». Acteur, il est éclipsé par sa 4ème épouse Audrey Hepburn, et son image reste très liée à elle.

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3. Nathalie Mikhaïlovna Soukhotine
° 16.1.1882 Moscou + 11.11.1925 Cannes (cimetière du Grand Jas)

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1901- de g. à d. : Hélène et sa soeur Vera Sollogub, assises à gauche de leur mère Nathalie Sollogub ; à droite : leur cousine Nathalie Mikhaïlovna Soukhotine

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à gauche, dans les bras de sa mère, Marie de Bode-Kolytchev, 1ère épouse de Michel S. Soukhotine

Souvenirs de son fils Serge Obolensky :

Quelle qu’en put être l’origine, l’esprit de maman était totalement étranger au christianisme moralisant de Tolstoï et à la mystique de Dostoïevsky et aussi au culte de la culpabilité propre aux deux (dans ce culte de la culpabilité, n’y avait-il pas parfois un peu de pose ?). Ces choses-là nous étaient étrangères (…). Peut-être pouvait-on dire de maman ce que Tolstoï dit d’une autre femme : « Elle ne sens pas sa conscience, comme nous ne sentons pas nos organes internes tant qu’ils fonctionnent bien. »

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Gaspra, décembre 1901 : de g. à d. : Léon Tolstoï – Nicolas Obolensky (chapeau melon) – X – Tatiana Lvovna Tolstoï (grand chapeau), 2de épouse (depuis 1899) de Michel S. Soukhotine – Nathalie Mikhaïlovna Soukhotine, fille du 1er mariage de Michel S. Soukhotine, future épouse (en 1909) de Nicolas Obolensky – Macha Lvovna Tolstoï (+ 1906), épouse de Nicolas Obolensky – docteur P. Boulanger – X – Lisa Obolensky, mère de Nicolas Obolensky – Sacha Lvovna Tolstoï

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1908 – les Soukhotine à Rome – Nathalie Soukhotine (grand béret) devant son père Michel (casquette)

Parmi tous ces éléments, je ne vois pas de religion. Je n’ai jamais vu chez maman le moindre signe de piété. Un respect certain de l’Evangile et de la personne du Christ, mais pas plus. Il y avait même chez elle une certaine méconnaissance des faits élémentaires. Je crois deviner que cet esprit particulier, fait d’une certaine indifférence envers la religion, de droiture et de simplicité (jamais de « grands mots »), vient soit des Diakov (la mère du grand-père Soukhotine) qui descendait d’un Diakov franc-maçon du XVIIIème siècle, soit de Domachnev, un aïeul qui fut collaborateur de Catherine II et président de l’Académie des Sciences, de 1775 à 1783, ensuite écarté par Catherine II, et qui vécut en intellectuel retiré à Moscou.
Il y a là une tradition plus rigoureuse que celle des Tolstoï (qui sont plus artistes). Mais qui peut maintenant résoudre le mystère de ces ascendances spirituelles ? De telles paternités multiples abondent, mais elles se manifestent souvent par des allergies : « ceci n’est pas acceptable », « ceci est faux », ou « à éviter ». Toutes ces allergies président à bien des choix.
Presqu’à la veille de sa mort, parce que tante Kitty Cheine (Catherine Ourousov, belle-soeur de Youri Obolensky, frère de Nicolas) avait insisté, maman a reçu la visite du prêtre orthodoxe de Cannes. Après avoir parlé avec lui, elle lui dit : « Non, je ne suis quand même pas assez d’accord avec l’Eglise pour recevoir les sacrements ».

Capture d_écran 2017-08-05 à 11.16.33C’est Monseigneur van Caloen [photo ci-contre], fondateur de l’abbaye bénédictine de Saint André-lez-Bruges, alors retiré au Cap d’Antibes pour raisons de santé, qui découvre la famille de Nicolas Obolensky réfugiée à Nice.

« Je vous demande bien pardon, Monseigneur, de ne vous avoir pas répondu plus tôt à votre bonne lettre. C’est que j’ai été malade tout ce temps-là et le suis encore. Pour le moment, je ne puis être d’aucune utilité … »

Cet extrait d’une lettre de Nathalie Obolensky à Mgr van Caloen est datée du 1er septembre 1925. Deux mois et demi plus tard à l’Hospice Civil, la tuberculose l’emporte. Elle a 41 ans. Elle sera inhumée dans la partie protestante du cimetière du Grand Jas de Cannes. « Fosse commune, piquet n° 47, sépulture qui n’existe plus à ce jour, » m’a-t-on écrit du Bureau du Cimetière.

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x Nice 23.1.1909 prince Nicolas Léonidovitch Obolensky
° 28.11.1872 Moscou + 12.2.1934 Abbaye de Saint-André-lez-Bruges
Fils du prince Léonide Dimitriévitch et de le comtesse Elisabeth Valérianovna Tolstoï dont la mère était la soeur de Léon Tolstoï. Marié en premiè­res noces à la comtesse Macha Lvovna Tolstoï (+ 27.11.1906), fille de l’écrivain. [photo ci-dessous]

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Un soir on accourt chez lui pour l’avertir que des bandes armées (en fait des déserteurs de l’armée russe en déroute) s’approchent et brûlent domaines et châteaux. En toute hâte, une fuite est organisée vers Yasnaïa Poliana à 60 kms de là, domaine protégé de feu Léon Tolstoï, devenu héros national malgré lui.

En moins d’une heure nous étions en équipage : ma femme, mes quatre enfants, la bonne et moi, avec un vieillard sur le siège de la calèche, le seul qui ait consenti à y prendre place, tous les autres ayant refusé par crainte de représailles. Nuit froide, avec un brouillard que perçait la lune. Les enfants pleuraient, nos serviteurs et servantes aussi ; au loin on entendait les cris et le bruit des chars qui partaient à l’assaut des domaines voisins.
Quinze kilomètres nous séparaient de la voie la plus proche, mais il fallait côtoyer des propriétés sans doute assiégées. Après de nombreux détours nous tombâmes au milieu d’une masse armée. Les émeutiers tentèrent de nous arrêter. Si cela se faisait notre massacre était certain. Quelques Bolcheviques se cramponnèrent aux harnais de nos trois chevaux qui n’avaient jamais su ce qu’était un fouet. Enervés par les cris de la populace, ils prirent le mors aux dents et foulèrent ceux qui les tenaient. Nous passâmes sur trois ou quatre corps gisant par terre et partîmes à toute vitesse à travers les champs. Au bout de quelques kilomètres nous parvînmes à les arrêter. Une dizaine de propriétés brûlaient au loin et les incendies embrasaient le ciel autour de nous. Au matin, nous étions arrivés à Yasnaïa Poliana.

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Suivent plusieurs années de vie précaire. Nicolas Obolensky est nommé pour un certain temps gérant du domaine nationalisé de Yasnaïa Poliana. Mais il est dangereux de porter le nom d’Obolensky, même lorsqu’on est le neveu (et ex-gendre) de Tolstoï … Suspecté de sympathie envers les réactionnaires, il est emprisonné dans les caves de l’archevêché de Toula, siège de la police secrète. Relâché, il se voit imposer une résidence forcée à Moscou, sous stricte surveillance policière. Il trouve un petit emploi au ministère de l’Agriculture.

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A Moscou non plus il ne fait pas bon s’appeler Obolensky. Nicolas est à nouveau emprisonné, mais son épouse et les quatre enfants, aidés par la Croix-Rouge de Genève, réussissent à quitter le pays dans l’espoir, partagé par tous les Russes émigrés de cette époque, que cet exil ne sera que provisoire.

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Le laissez passer n° 8968 de la Légation de Belgique à Berlin, autorise Madame Nathalie Obolensky, née à Moscou le 16 janvier 1882, se rendant en France, à transiter par la Belgique, sans arrêt, accompagnée de quatre enfants. Le cachet du contrôle des douanes, en gare d’Herbestal, porte la date du 26 mai 1925. La photo du passeport [illustration ci-dessous] résume tout le drame : l’inquiétude se lit sur les visages, les vêtements sont fripés ; déjà la mère présenteun visage amaigri et éreinté par la tuberculose qui l’emportera quelques mois plus tard.

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.1. prince Serge Nicolaïevitch Obolensky
° 15.12.1909 Pirogovo + 9.11.1992 Bruges

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Avec sa soeur aînée Marie

Extrait d’un article de « Plamia 1993 » :

La vie du prince Serge Obolensky fut singulière comme l’était sa personnalité. Il passa son enfance à lasnaïa Poliana où, après la révolution, son père avait été nommé intendant de la propriété. Comme lycéen il assista aux obsèques de Lénine et se souvenait même de la chanson assez irrévérencieuse qu’il chantait à cette occasion avec ses camarades. Obligés de quitter leur patrie, ses parents se réfugient en France où Serge [photo de droite] complètera ses études au collège de Cambrai, puis en Belgique où une partie de sa famille s’est enracinée.
Né dans une famille libérale, en politique comme en religion, Serge se tourna vers le catholicisme. Il ne s’agissait pas seulement d’une nouvelle orientation religieuse ou d’une simple intégration dans le nouveau milieu qui devenait le sien puisqu’il décida de devenir moine et prêtre.
Serge Obolensky n’a jamais fait les choses à moitié. Attiré par l’ordre bénédictin, il entra au monastère de l’Union à Amay-sur-Meuse, puis fut envoyé à Rome à l’Abbaye Saint Anselme où il fit ses études de philosophie. Ayant décidé de choisir le clergé séculier, il entra au Russicum en 1935 pour ses études de théologie. Il fut ordonné prêtre en 1940, au titre de la Congrégation pour les Eglises Orientales. Le cardinal Tisserand avait été et demeura l’autorité paternelle auprès de laquelle il trouva toujours aide et compréhension.

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Serge et sa soeur Marie Obolensky avec leur grand-mère Lisa Obolensky, fille de Maria Nicolaïevna Tolstoï, soeur de Léon

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A Amay : Hélène – Dimitri – Serge

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1934 – Amay/Chevetogne : visite de Monseigneur Roncalli (futur pape Jean XIII) – Serge est en haut à gauche – à droite : séminariste à Saint-Anselme – Rome

Il achèvera ses études supérieures à l’université Grégorienne où il obtint un doctorat de philosophie en défendant sa thèse sur Alexis Khomiakov : « La philosophie de l’esprit de A.S. Khomiakov » (1943). Il s’était déjà fait remarquer à la fois par son souci de grande rigueur dans la pensée comme aussi par une dose de non conformisme qui ne pouvait échapper à personne. En raison de ses succès et plus encore de sa grande curiosité d’esprit et de ses connaissances dans des domaines fort variés mais spécialement dans celui des idées philosophiques en Russie, il semblait tout désigné pour devenir professeur d’histoire de la philosophie russe à l’Institut Oriental. Mais la chose ne fut pas possible, semble-t-il, pour des raisons administratives.
Avec la guerre commencent diverses activités, souvent au service de ses compatriotes qui se trouvaient alors en Italie. Cette action tout à la fois caritative et missionnaire se doublait d’une activité de journaliste, lui élargissant encore le champ de ses relations et de ses contacts avec les milieux les plus divers. Faut-il dire que cette activité n’était pas du goût de tout le monde car elle n’était guère conforme au modèle de l’activité sacerdotale habituelle.
Avec la fin de la guerre, le P. Serge revient en France à Meudon [illustration ci-dessous de gauche]. Il fait partie des professeurs de l’Internat et s’attache spécialement à l’enseignement du russe. Ses cours, et en particulier sa lecture d’Eugène Onéguine, sont à la fois une occasion d’étudier avec précision la langue classique de Pouchkine mais aussi d’ouvrir les élèves à tous les problèmes de l’histoire russe. Mais la vie d’une école ne se réduit pas aux cours magistraux, il y a les contacts avec les élèves et l’éveil aux questions du moment, celles qui se posent ici et celles qui se posent en URSS. Ce travail qui est celui d’un vrai pédagogue, le P. Serge sut le faire, excellemment, mais à vrai dire en s’adressant à un groupe réduit, aux individualités chez lesquelles il trouvait du répondant.

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Cependant cet enseignement ne suffit pas à occuper le P. Serge, il se lance dans une étude précise du monde soviétique. A vrai dire, la présentation de l’URSS telle qu’elle était faite alors dans la presse comme à l’université était très déformée par des préjugés idéologiques : à cette époque on enseignait partout que « l’URSS n’est pas dangereuse politiquement, car elle est fondamentalement démocratique ; mais elle est très dangereuse économiquement, car grâce à l’économie planifiée elle va bientôt nous écraser ». Le P. Serge savait que ce jugement était stupide et il le disait.

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Secrétaire (en tout bien tout honneur) du club nautique à Fontainebleau

Mais pour s’opposer à l’opinion dominante il ne suffit pas de dire la vérité, il faut la prouver par une solide argumentation. Le P. Serge se lance alors dans une immense enquête sur l’économie réelle du bloc soviétique. Conscient du mensonge généralisé de l’information officielle, il a l’audace de penser que seules des méthodes similaires à celles utilisées pour étudier les civilisations disparues permettent une approche scientifique ! Aujourd’hui on sait qu’il avait raison mais il fallait son indépendance d’esprit pour se lancer dans une telle aventure pratiquement en solitaire.
Finalement c’est du côté de l’armée [illustration page prédente] qu’il sera reconnu : il sera recruté par l’OTAN pour le SHAPE comme expert civil des problèmes soviétiques. C’est l’époque où il vit à Fontainebleau. Son travail demande la discrétion et dès lors il prend quelques distances avec ses anciennes relations mais sans jamais rompre les liens. Depuis des années il ajoutait à ce travail une activité de traducteur : il traduisit les deux volumes des Mémoires du Maréchal G. Joukov (1970).
De plus, il fut chargé par la Congrégation pour les Eglises Orientales de s’occuper de la traduction en russe des textes du missel romain. Une tâche qui l’intéressa beaucoup et à laquelle il se dépensa tout entier avec son goût de la langue, ses exigences esthétiques et sa rigueur théologique. Là aussi, ses positions originales et tranchées ne furent pas pour lui source de grandes satisfactions, mais son oeuvre en ce domaine aussi restera éclairante et portera un jour ses fruits. Cet homme qui mena toujours une vie très personnelle savait partager la vie de la communauté, au moins pour ce qu’il estimait essentiel. De même il sauvegarda toujours les liens avec sa famille, spécialement avec sa soeur [illustration ci-dessous], Madame Thierry d’Ydewalle, chez laquelle il venait tous les ans passer ses vacances. C’est au cours d’un séjour chez elle qu’il est décédé à la suite d’une hémorragie cérébrale.

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1.5.(b).11.2.8.7.4.3.2. princesse Maria Nicolaïevna Obolensky
° Pirogovo 21.7.1911 + 9.11.1925 Monte-Carlo
Décédée à 14 ans de la tuberculose à l’hôpital de la Principauté de Monaco (aujourd’hui Centre Hospitalier Princesse Grâce) deux jours avant le décès de sa mère. « Marie Obolensky a été inhumée en pleine terre, piquet n° 58 du cimetière ; cet emplacement n’existe plus ».

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Extrait des notes de Nicolas Obolensky, rédigées en novembre 1928, trahissant un grand désarroi :

« … écrit durant les journées de la mort de N. [Nathalie] et M. [Marie]. A l’hôpital de Monaco, lorsque l’infirmière Madeleine cherche un réconfort moral, elle appelle toujours Machenka [petite Marie] à l’aide. Tous sentaient que cette fillette était une martyre choisie, hors du commun … »

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.3. prince Dimitri Nicolaïevitch Obolensky
° 24.7.1915 Pirogovo + 2.9.1984 Auckland

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avant l’émigration : Nathalie Obolensky et ses enfants Dimitri – Serge – Marie et Hélène

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1930 : Dimitri – Nicolas – Hélène  –  Abbaye de Saint-André : Dimitri et Nicolas Obolensky

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4. princesse Hélène Nicolaïevna Obolensky
° 29.12.1916 Pirogovo + 18.4.1996 Jabbeke

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Au milieu : dessin de l’artiste britannique Neville Lytton (1879-1951)

Bruges, le 28 décembre 1939, par un jour de neige. Un journal local titre : « Te Brugge had het huwelijk plaats van een Russische prinses, Hélène Obolensky, dochter van prins Nicolaas Obolensky, met ridder Thierry van Outryve d’Ydewalle. » Ce mariage entre un digne représentant du High Life du plat pays et une jeune fille venue des lointaines steppes russes n’est pas d’emblée accueilli avec tout l’enthousiasme qui convient. Un jeune homme sous les armes – nous sommes à la veille de la guerre – qui épouse une réfugiée russe sans le sou, titulaire d’un passeport Nansen pour réfugiés apatrides et dont on dit de surcroît qu’elle est une intellectuelle, sous-entendu incapable de tenir un ménage … voilà de quoi secouer l’establishment brugeois ! Et ils furent heureux et eurent quatre enfants, l’intellectuelle ayant déclaré que, puisqu’elle savait lire, elle pouvait parfaitement déchiffrer des recettes de cuisine et par conséquent nourrir sa famille !
Avec les années, la Russe émigrée se sera si bien intégrée dans sa nouvelle patrie qu’une notice sur le village de Jabbeke où elle réside, « Historie en Legenden », la cite comme curiosité locale : « een villa, eigendom van ridder Thierry van Outryve d’Ydewalle … zijn weduwe, Helena Obolensky, die er momenteel nog woont, is een Russische prinses. Het park « Wildernis », zo noemt het, wordt nog beheerd door de gastvrije Prinses die bovendien vlot Nederlands spreekt. »
x Bruges 27.12.1939 chevalier Thierry van Outryve d’Ydewalle
° 15.7.1911 Beernem + 30.11.1957 Bruges
Fils du chevalier André van Outryve d’Ydewalle et de Marie de Vrière.

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Extraits de : « Hélène Nicolaïevna Obolensky, princesse de Bruges (1916-1996), à propos d’une Rurikide » :

Ce qu’on appelle avec nostalgie les « tennis de châteaux » la font rencontrer un certain Thierry d’Ydewalle. Bien avant les congés payés et les voyages en charters, le jeune homme avait bourlingué à vélo, à moto, en bateau, au travers de l’Europe, du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord. La jeune fille ne rêve plus que d’être enlevée à moto mais c’est avec une voiture sport flambant neuve que son soupirant réussira à la séduire lors d’une invitation à prendre le thé à la côte. On connaît la suite … Pour lui sans aucun doute, épouser une réfugiée russe était la chose la plus naturelle qui soit !

Louis Ryelandt, échevin de l’Etat Civil de Bruges, officie au mariage civil :

Capture d_écran 2017-08-05 à 15.36.18Mon cher ami, vos amis apprécient votre bon coeur et la noblesse de vos sentiments, ils savent aussi votre penchant pour la vie quelque peu aventureuse et nomade, votre dédain des chemins battus et des conceptions banales. L’on disait qu’une jeune fille du type habituel ne pourrait fixer votre sympathie. Et voilà que parmi le parterre de jeunesse qui s’offrait à vos regards, vous avez distingué une fleur rare issue du pays des neiges. Vous l’avez cueillie ; je vous en félicite, comme je vous félicite, Madame, de vous être laissée cueillir. La Divine Providence, dans ses desseins insondables, vous avait réservé une enfance tragique, une adolescence semée de difficultés et d’inquiétudes ; mais votre âme indomptable s’est trempée au contact des épreuves et vous vous êtes faite la jeune fille dont j’ai entendu vanter de tous côtés la distinction innée, les charmes de l’esprit et du coeur.

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.1. chevalier Nicolas van Outryve d’Ydewalle
° 26.2.1942 Bruges
Licencié en Sciences Commerciales et Consulaires ; lieutenant-colonel de réserve honoraire au Régiment Para-Commando.
x 13.7.1968 Liège Armelle Hanquet
° 8.7.1941 Liège

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.1.1. Natacha van Outryve d’Ydewalle
° 18.7.1972 Bruxelles
S’il y a deux choses dont Natacha n’a jamais douté, c’est de son amour pour une nature qui, depuis toujours, l’enchante et du lien privilégié qui l’unit aux animaux. Alors que cette évidence aurait dû la mener vers des études de vétérinaire, de biologiste ou d’agronome, allez savoir pourquoi, c’est dans le bain des ingénieurs commerciaux qu’elle décide de se plonger durant cinq ans. Sa formation en poche, elle n’a cependant pas le goût de se lancer dans une carrière qui, à ses yeux, la priverait de liberté. Le petit tailleur, les horaires réguliers et la hiérarchie, très peu pour elle ! C’est alors que l’appareil photo offert par sa grand-mère pour ses douze ans lui apporte une alternative alléchante. Accès à la profession en poche, la voilà donc photographe de presse et parfaitement heureuse de l’être, à 100% dans le moment présent ! Au fil des ans, elle se spécialise dans les portraits atypiques de tout ce que la Belgique compte comme leaders économiques et politiques. Un comble pour quelqu’un à qui, jadis, un oncle reprochait à ses photos de ne dévoiler aucun visage humain.
Après dix ans de bons et loyaux services, Natacha ne trouve plus de sens à son travail. Outre le fait qu’esthétiquement parlant, l’homme d’affaires dans son biotope naturel est loin de régaler l’oeil, il lui est de plus en plus difficile de voir ces décideurs peser sur l’avenir du monde (et pas toujours dans le bon sens !) tandis qu’elle se contente de les observer. Bref retour alors sur les bancs de l’université pour suivre un D.E.S. en sciences et gestion de l’environnement. Cette fois, elle s’y délecte de tous les cours car ils parlent enfin du vivant ! Elle choisit ensuite, notamment au sein du mouvement Slow Food, d’accompagner des restaurateurs en leur faisant prendre conscience du lien existant entre le choix de leurs produits et les questions environnementales.

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En 2010, lors d’une rencontre inoubliable en Amazonie avec des singes laineux rescapés du trafic, elle sent qu’il se passe quelque chose d’essentiel. Elle n’aspire plus qu’à une chose désormais : travailler aux côtés de ceux et celles qui se battent pour le respect du vivant !

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.1.2. Arielle van Outryve d’Ydewalle
° 21.1.1975 Bruxelles
Premier Prix du Conservatoire Royal d’art dramatique de Bruxelles, classe de Michel de Warzée ; I.A.D. Section Théâtre ; Ecole Internationale de Théâtre LASSAAD, masque et pantomime & ICART International (communication artistique), formation d’attachée de presse.

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.2. chevalier Serge van Outryve d’Ydewalle
° 17.4.1944 Saint-André-lez-Bruges + 28.7.2004 Bruxelles

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x (a) 3.5.1969 Bruxelles (div 1977) Armelle Ryelandt
° 26.2.1946 Bruxelles + 3.3.2004 Bruxelles
x (b) Bruxelles 24.1.1995 Hélène Sergueïevna Sunnerberg
° 12.12.1948 Moscou

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3. chevalier Hugues van Outryve d’Ydewalle
° 29.3.1949 Bruges
x 13.10.1973 Louvain Béatrice van de Wyer
° 28.11.1948 Louvain

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3.1. Géraldine van Outryve d’Ydewalle
° 1974 Angleterre
x 2000 Didier Schoepp
° 27.11.1973 Bruxelles

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3.1.1. Nathan Schoepp
° 28.9.2002

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3.1.2. Marine Schoepp
° 21.11.2003

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3.1.3. Antoine Schoepp 
° 6.12.2005 Bruxelles

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3.1.4. Manon Schoepp
° 19.7.2008 Bruxelles

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Marine, Manon, Antoine & Nathan Schoepp

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3.2. chevalier Thierry van Outryve d’Ydewalle
° 30.6.1977 Bruxelles

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3.3. chevalier Benoît van Outryve d’Ydewalle
° 20.11.1983 Bruxelles
x 5.10.2013 Astrid de Ville de Goyet
° 11.4.1987 Namur
Fille de Xavier de Ville de Goyet et Pascale Sepulchre.

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3.3.1. Romane van Outryve d’Ydewalle

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.3.3.2. Louise van Outryve d’Ydewalle
° 24.9.2017 Bruxelles

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4. Catherine van Outryve d’Ydewalle
° 25.2.1952 Bruges
x 12.10.1974 Jabbeke Bernard van der Haert
° 15.7.1949 Gand

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4.1. Christophe van der Haert
° 24.7.1976 Bruges
x 2009 Ariane Goffin
° 20.9.1978 Ottignies

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4.1.1. Alexandre van der Haert
° 12.11.2010 Bruxelles

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4.1.2. Elena van der Haert
° 11.5.2012

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4.1.3. Alban van der Haert
° 28.10.2014

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Christophe et Arianne van der Haert avec leurs enfants Alexandre, Elena et Alban

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4.2. Olivier van der Haert 
° 23.7.1977 Bruges
x 2008 Katrien Talpe 
° 8.3.1977 Roeselaere

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Olivier et Katrien van der Haert avec leurs enfants Elise, Leo et Nicolas

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4.2.1. Elise van der Haert
° 31.7.2011 Bruxelles

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4.2.1. Leo van der Haert
° 15.4.2014

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4.2.2. Nicolas van der Haert 
° 15.4.2014

Capture d_écran 2017-08-05 à 16.23.241.1.5.(b).11.2.8.7.4.3.4.4.3. Cédric van der Haert [photo ci-contre]
° 27.3.1985 Bruges
Commercial Engineering, Applied Economics & Marketing Finance ; Benelux Institutional Derivatives Sales at Credit Suisse, London.

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.4. Michel Mikhaïlovitch Soukhotine
° 19.2.1884 Moscou + 11.11.1925
Diplômé de la Faculté de droit et sous-lieutenant aux Gardes à Cheval. Pendant la première guerre mondiale, il édite le « Lviv Gazette ». Amateur de poésie, il écrit des poèmes. Léon Tolstoï l’appellera « le plus doux des Soukhotine ».
x Olga NN 

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.5. Serge Mikhaïlovitch Soukhotine
° 18.2.1887 Kotchety + 4.6.1926 Choisy-le-Roi
Toute son enfance se passe dans la propriété ancestrale de Kotchety datant de Pierre le Grand, parmi ses cinq frères et soeur : Léon (1879), Nathalie (1882), Michel (1884), Alexis (1888) et Fedor (1895). Sa mère, Marie de Bode-Kolytchev, meurt de la tuberculose en 1897 lorsqu’il a dix ans. Son père se remarie ensuite avec Tatiana Lvovna Tolstoï, la fille aînée de l’écrivain.

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Au mois d’août 2016 paraît en Russie une biographie sur Serge Soukhotine, intitulée « Qui êtes-vous, lieutenant S. ? » (КТО ВЫ, « ПОРУЧИК С. » ?) [illustration ci-dessous], suivant l’appellation utilisée par Vladimir Pourichkevitch dans son opuscule « J’ai tué Raspoutine ».

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Il s’agit d’un mémoire de fin d’études rédigé par une jeune historienne, Maria Sergueïevna Svidzinskaya, contenant une multitude de détails totalement inédits. Outre la consultation d’archives russes, l’ouvrage se base partiellement sur les mémoires de Léon Soukhotine.  L’aspect folklorique entourant la liquidation de Grigori Raspoutine est laissé quelque peu à l’arrière-plan au profit d’une description détaillée des étapes de la courte vie (39 ans !) de Serge Soukhotine. D’ailleurs, le rôle qu’il était censé jouer dans l’assassinat de Raspoutine était modeste : après la soirée passée chez Félix Youssoupov, il devait revêtir la pelisse du staretz pour faire croire que celui-ci avait bien quitté le palais de la Moïka …
Si l’énoncé de son nom est régulièrement omis dans les différents compte-rendus historiques de cette affaire, il est parfois cité sans son prénom ou avec un prénom inexact, y compris par des historiens sérieux tel qu’Henri Troyat. En lui attribuant le grade soit de lieutenant, soit de capitaine, on a parfois écrit qu’il faisait partie du prestigieux Régiment Préobajenski. En réalité, Serge était lieutenant et il n’a jamais servi dans ce régiment mais bien au 1er Régiment d’Infanterie de la Garde Impériale ainsi qu’au 4ème Régiment des Fusilliers de la Garde.
Pour la petite histoire, lors de l’apparition à Paris en 1930 d’une série d’articles dans le magazine russe « La Russie Illustrée » sur l’assassinat du staretz, son appartenance au Régiment Préobajenski sera formellement démentie par le président de l’Amicale des Anciens, sans doute peu désireux de compter un « meurtier » parmi ses membres, ce qui ne cadrait sans doute pas avec l’honneur du régiment !
Le principe « d’état de nécessité », consistant à effectuer une action contraire à la loi mais visant à empêcher la réalisation d’un dommage bien plus grave, semble ici parfaitement justifié … Le postulat de base pourrait se résumer en quelques mots : le tsar était absent du pouvoir civil puisqu’il avait pris la décision d’exercer lui-même le commandement de l’armée. Restée à Saint-Pétersbourg, la tsarine suivait aveuglément les conseils de Raspoutine qui nommait et défaisait les ministres à sa guise. L’autorité impériale en tant que telle n’existait plus, la fronde régnait dans les tranchées. Tout cela ne pouvait que mener au désastre …

CORPS DES CADETS DE LA MARINE

Nous sommes en 1901, Serge a quatorze ans. Son père Michel Sergueïvitch le conduit à Saint-Pétersbourg pour l’inscrire au Corps des Cadets de la Marine.

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Corps des Cadets le Marine avant la Révolution & vue actuelle

Capture d_écran 2017-08-05 à 16.53.09Bien que Serge perpétue ainsi une tradition familiale brillamment représentée par Yakov Filippovitch Soukhotine [illustration ci-contre], vice-amiral et commandant de la flotte de la mer Noire en 1783, cette situation chagrine fort sa belle-mère Tatiana car elle ne le voit pas se lancer dans une carrière à l’armée. Cela ne correspond pas à la doctrine d’un christianisme authentique de Léon Tolstoï, sentiment que partage également son frère Léon Soukhotine.
A l’époque, le Corps des Cadets est considéré comme la plus ancienne « haute école » en Russie. Son objectif n’est autre que d’assurer une éducation aux jeunes et de les préparer à devenir officiers de marine, tout en leur prodigant une éducation de grande école, un cursus d’une durée de six ans.
Serge réussit les examens d’entrée sans difficulté. Il faut 8 points pour chaque matière. Il en récolte 12 en arithmétique, 9 en algèbre, 10 en histoire et en géographie, 11 en langue russe et 12 en français. Il est enrôlé le 2 septembre 1901 en tant que cadet junior.
Capture d_écran 2017-08-05 à 16.53.19Pour l’anecdote, on relève sur la période 1902-1904 un série de mauvaises notes en discipline. Cela semble dû à la direction extrêmement autoritaire de la part du commandant de l’époque, l’amiral Grigori Tchoukhnine. [illustration ci-contre]
La privation de jours de congé est le plus souvent infligée comme punition. Les motifs sont variés : perte du permis de sortie, arrivé en retard le matin, salut militaire avec la main gauche dans la poche, absence à la prière du matin, a effectué la gymnastique d’une manière paresseuse, a fait du bruit au dortoir, mauvaise tenue durant la parade du matin, mauvaise conduite à table, a regardé son supérieur d’un air moqueur dans les yeux, était aux toilettes durant un exercice de voiles, etc !
Dès 1904, un nouveau commandant prend la relève, le vice-amiral Rimsky-Korsakov. Par sa bonté et son humanité, il est à l’opposé de son prédécesseur au point de recevoir le surnom de « l’Apôtre » par les cadets et les aspirants sous ses ordres. La discipline redevient moins contraignante et Serge ne connaît qu’une seule réprimande durant toute la période 1904-1906. Une transgression inattendue : on le rencontre sur la Perspective Nevski à Saint-Petersbourg avec un châle qui lui cache le nez … symbole de « déloyauté envers le régime en place », un mauvais souvenir hérité de la révolution française et que, de plus, nous sommes en 1905 en pleine période révolutionnaire !
Trois années passent. Il semble qu’il ait contracté une forme de tuberculose des os, ce qui donne lieu à un vif échange de télégrammes avec la famille à propos de son état de santé. Le 5 janvier 1904, Tatiana note dans son journal : « Serge est revenu et a déclaré à son père qu’il voulait quitter le Corps des Cadets car il n’a aucune envie d’être militaire ». Un sentiment encore aggravé par la défaite de Tsushima en 1905 (anéantissement de la flotte russe lors de la guerre russo-japonaise), signifiant pour lui une tragédie personnelle car deux de ses cousins y perdent la vie. La responsabilité du commandement supérieur dans ce désastre le marque profondément. En 1906, il a dix-neuf ans, Serge quitte définitivement les Cadets de la Marine, muni d’un certificat de suivi des cours, équivalent à un grade d’aspirant. Les attestations scolaires émises à son sujet sont positives : « très bon sous tous aspects » (1902) ; « s’affranchit et est plus à l’aise, reste très bon » (1904) ; « jeune homme moral, éduqué et discipliné, lit beaucoup » (1905) ; « bien éduqué, discipliné, agile, connaît les règles » (1906).
Par ailleurs, Serge aura bénéficié d’une éducation chrétienne très poussée, un élément d’éducation jugé important dans la formation des Cadets de la Marine. La religion doit déboucher sur une ligne de vie du futur officier : droiture, discipline, autorité, obéissance à l’Empereur …

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Au dos de la photo ci-dessus datant de 1902, on peut lire cette inscription : « A Sacha Tolstoï, en souvenir de son ami qui ne l’oubliera jamais et qui pense beaucoup à elle. Qu’elle ne m’oublie pas non plus ! Sergueï Suchotin ». Amie d’enfance de Serge, Sacha  n’est autre qu’Alexandra Lvovna Tolstoï, la plus jeune fille de l’écrivain et soeur de sa belle-mère Tatiana.

UNIVERSITÉ DE LAUSANNE

Serge décide de s’inscrire à l’Université de Lausanne. Suivant la « Gazette Universitaire de Lausanne », plus d’un tiers des étudiants étrangers de l’année académique 1907-1908 étaient russes. Cette prédominance causera d’ailleurs une réaction de la part des autorités suisses qui tenteront d’endiguer le flot des nouveaux arrivants en exigeant un certificat d’études en bonne et due forme, preuve d’une scolarité réussie dans le pays d’origine. Aucun problème pour Serge qui dispose d’un certificat du Corps des Cadets de la Mer. Tandis que pour l’année académique 1909-1910 il est inscrit à la Faculté de Philologie et Lettres, sa cousine Elena Sollogoub [illustration ci-dessous] l’est à la Faculté de Médecine.

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Contrairement à certains de ses compatriotes, Serge ne se sent pas dépaysé dans son environnement suisse : son père avait l’habitude d’emmener sa famille pour de courts séjours en Europe centrale, Berlin, Rome, Lausanne et Naples. En effet, la tuberculose était la maladie récurrente dans la famille Soukhotine. Sur les six enfants, trois au moins en ont souffert : Léon, Serge et Nathalie. Un climat chaud était donc recommandé durant les hivers russes.
Serge entretient une correspondance régulière avec la famille en Russie. Les questions de théologie et de religion font partie de ses préoccupations. Il se sent fortement influencé par la doctrine de Léon Tolstoï : « Il est important que les jeunes soient en demande morale et qu’ils cherchent leur propre voie dans leur développement personnel », affirmait l’écrivain. Ce qui n’empêchait pas son père d’être sceptique quant aux chances de réussite de son fils : « Il sait beaucoup de choses, mais d’une manière bien superficielle », se plaignait-il.

DANS LA BONNE SOCIÉTÉ

Serge a vingt-trois ans en 1911. Rentré de Suisse, il reprend une formation militaire comme volontaire au 4ème Régiment des Fusilliers de la Garde où il franchit les étapes successives vers le grade d’officier subalterne. Il est ensuite transféré dans l’armée de réserve en tant que lieutenant. Il semble en tirer une certaine fierté vis-à-vis de son frère plus âgé Mikhaïl qui avait choisi la carrière d’officier.
De retour à Moscou, il entre de plain pied dans les mondanités. Cela n’empêche pas de poser un regard décalé sur le monde dans lequel il vit. Il se met en scène dans un poème teinté d’ironie : « Un bon mari doit savoir danser, bien patiner, jouer au bridge, jouer de la guitare, chanter des chansons, avoir du style et être capable de maintenir une conversation en sachant divertir les jeunes filles … » Il est fréquemment invité à des soirées, bals et autres festivités, tant à Moscou qu’à Saint-Petersbourg. Comme il joue de la guitare et qu’il a une passion pour les chansons tziganes, très en vogue parmi la jeunesse russe du moment, on lui demande souvent de ne pas oublier d’apporter son instrument de musique avec lui. On le rencontre dans l’une des propriétés de Konstantin Petrovitch Kleinmichel [illustration ci-dessous] qui organise régulièrement des festivités où les invités portent d’anciennes tenues traditionnelles.

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Pour la petite histoire, Konstantin Kleinmichel était l’un des enfants naturels de Nicolas Ier. On dit que la mère de Konstantin, née Kleopatra Petrovna Ilyinskaya, avait adopté les enfants naturels du tsar. Quant aux propres enfants de Konstantin, des liens de chaude amitié se noueront entre certains d’entre eux et Serge. Il dédiera même quelques poèmes et chansons à Olga, Hélène et Natalia qu’il appellera ses muses !

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Olga, Claire et leur frère Wladimir et Catherine Kleinmichel – témoins d’une époque disparue …

Selon ses notes manuscrites, Serge aurait eu un point de vue assez négatif sur le mariage, étant donné que « le mariage se termine par la liberté de l’homme et de sa responsabilité personnelle dans les actions. L’anneau de mariage est le premier maillon de la chaîne que nous nous mettons volontairement à nous-mêmes » ! Il semblait même croire en l’amour en dehors des liens du mariage … Ne s’amouracha-t-il pas d’une Nathalie Fedorovna Gagarine, femme mariée et mère de trois enfants dont il souhaita qu’elle divorce ? Une aventure qui dura six mois et provoqua un sérieux conflit avec son père. On dit même que cela aurait pu causer le décès par crise cardiaque de ce dernier, le 14 août 1914.

BLESSURE DE GUERRE

Juillet 1914, à la veille de la déclaration de guerre, Serge est lieutenant de réserve au sein du 4ème Régiment des Fusilliers de la Garde, cantonné à Tsarkoïe Selo. Selon les archives militaires, il aurait commandé la 7ème compagnie de ce même régiment, ce qui expliquerait pourquoi on lui attribue parfois le grade de capitaine. Le 29 mars 1915, il est gravement blessé dans le dos. Suivant son carnet de notes, la blessure aurait été provoquée par un éclat de bombe lancée par un dirigeable allemand. On le retrouve à l’hôpital anglo-russe au palais du grand-duc Dimitri Pavlovitch (un des futurs co-auteurs dans l’assassinat de Raspoutine) à Petrograd où ses amis viennent lui rendre visite, dont Félix et Irina Youssoupov ainsi que Zinaïda Youssoupov, la mère de Félix.

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Palais Belosselski-Belozerski, connu avant la Révolution sous l’appellation de palais du grand-duc Dimitri, réquisitionné durant la guerre sous le nom d’hôpital anglo-russse, dirigé par la princesse Zinaïda Youssoupov.

« J’ai déjà commencé à marcher avec un bâton », écrit-il en espérant être rapidement remis sur pied pour retourner au front mais son traitement va durer plusieurs mois, d’avril 1915 à janvier 1916. Pour son service au combat, il est décoré de l’Ordre de Sainte-Anne (grade 4) ainsi que de l’Ordre de Saint-Vladimir.

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Serge avec ses décorations – Félix et Irina Youssoupov – Zinaïda Youssoupov, mère de Félix

Serge rejoint ensuite l’armée au sein d’un corps de réserve mais en janvier 1916, il est victime d’une commotion cérébrale, handicapant sérieusement sa santé. Il n’arrive plus à se déplacer au point de devoir demander à Irina Goryainova, sa future femme, de lui acheter une canne lorsqu’elle vient lui rendre visite. Il ne peut pas non plus participer à un drink offert en son honneur au mess des officiers à l’occasion de son retour. Dans sa correspondance avec Irina, il se plaint de mal dormir, d’avoir souvent d’insuportables maux de tête … Sa fiancée Irina lui reproche de ne pas vouloir demander son renvoi du service armé alors qu’il vient de subir une grave blessure. Serge répond que c’est son devoir d’officier de rester et qu’il aurait honte de rentrer chez lui sans raison valable et qu’il n’a aucune sympathie pour ceux qui le font !…
De retour à Petrograd, il est affecté à la Direction Générale des Approvisionnements auprès du Ministère de la Guerre, ce qui répond à son désir de rester actif comme officier. En janvier-février 1917, il est nommé secrétaire de la Conférence de Petrograd des puissances alliées, Russie, Grande-Bretagne, France et Italie. Comme il parle plusieurs langues, il sert également d’interprète. Il excellera même en tant que responsable d’un Comité d’approvisionnement logistique au profit de l’armée roumaine, après que le Roumanie ait rompu avec les puissances centrales ennemies.
Sans nouvelles de sa part depuis un certain temps , sa famille s’inquiète de son sort … jusqu’en mars 1916 où Serge annonce par courrier qu’il « a été blessé au front » et qu’il compte épouser Irina Goryainova, Irina Enery, la fameuse pianiste.

MARIAGE AVEC IRINA ENERI

x (a) 4.5.1916 Irina Alexeïevna Goryainova-Chegodaeva
° 5.11.1897 Moscou + 23.1.1980 Ste Geneviève des Bois
Fille d’un officier du nom de Biroukov et de Maria Ivanovna Bronikowski. Ses parents divorcent assez rapidement. Sa mère se remarie avec un autre officier, Alexei Goryainov, qui adopte Irina. Ce nouveau mariage est suivi d’un troisième puisque sa mère épouse ensuite le prince Alexander Chegodaev qui donne son nom à Irina, d’où son double nom de famille. Irina est une pianiste prodigue qui se produit depuis son tout jeune âge dans différentes salles de concert, y compris devant l’impératrice à Tsarkoïe Selo. Sa mère va concentrer toute son attention sur l’éducation musicale de sa fille en la confiant à Alexandre Glazounov [illustration ci-dessous], compositeur, chef d’orchestre et professeur au Conservatoire de Saint-Pétersbourg.

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Au mois d’août 1909, Irina et sa mère sont à Yasnaïa Poliana. La pianiste prodige de 12 ans joue longuement du piano pour Léon Tolstoï qui apprécie fort la musique. Ce dernier la trouve plein d’énergie, courageuse et fort indépendante. « Sa technique est époustoufflante, juge-t-il, mais est elle trop fière d’elle … »

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Serge attacha de l’importance à ce qu’Irina soit bien accueillie au sein de sa famille, d’autant plus qu’après le décès de leur père, c’est sur son frère aîné Léon que reposait maintenant l’autorité parentale. Et pour la réussite de son entreprise, n’avait-il pas été allumer un cierge devant l’icône de la Mère de Dieu à la cathédrale de Kazan ? Précédemment, la mère de la jeune Irina s’était opposée au projet de mariage de sa fille, jugeant Serge encore trop immature et qu’il risquait d’avoir une influence néfaste sur ses performances pianistiques. De plus, elle avait appris que Serge souffrait de la maladie héréditaire des Soukhotine, la tuberculose. « Comment avez-vous osé cacher cette maladie ? Deux médecins m’ont affirmé que ma fille risquait la mort en vous épousant ?… », s’était-elle indignée ! Heureusement, un médecin diagnostiqua que le mal n’était pas grave, qu’il s’agissait d’une tuberculose au genou qui n’était pas dangereuse …

Extraits des Souvenirs d’Hélène Bazilevski, épouse de Léon Soukhotine (Déda) :

(…) Nous revînmes à Marino où eut lieu le mariage de l’oncle Serge (le frère de Déda) et la fameuse pianiste Irène Enery [illustration ci-dessous] qui avait commencé sa carrière à 14 ans.

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C’est elle qui vit maintenant à Paris et qui est dans une profonde misère. C’est pour elle que j’ai écrit une lettre à la reine Elisabeth d’Angleterre, la priant de lui venir en aide, démarche restée sans succès. Ensuite, Serge se retrouva au front et fut bientôt blessé. Ce fut notre dernier séjour à Marino.

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Marino – propriété de Léon Soukhotine où se maria son frère Serge

Malheureusement, quelques années plus tard, Irina abandonne mari et enfant. En 1923, elle émigre en France et s’installe à Paris. De 1924 à 1967, elle participe à des récitals et à des concerts de bienfaisance, notamment en faveur de la Croix-Rouge ainsi que des réfugiés russes. Durant l’occupation de Paris par les Allemands, elle donnera plusieurs récitals en faveur du Fonds « Aide d’Hiver ». Après la guerre, elle poursuit ses activités en se consacrant à la musique de chambre de Chopin et à la culture russe sous le signe de l’unité « ancienne émigration et jeune génération de Russie ». Le 27 avril 1946, elle se remarie avec un certain Paul Petrovich Borowski (1892-1955) qui serait chauffeur de taxi. Un fils serait né de cette union, il aurait travaillé en 1982 à la télévision américaine à Berlin. Irina passe les dernières années de sa vie dans la « Maison Russe » pour les immigrés russes âgés à Sainte-Geneviève-des-Bois, près de Paris. Elle décède le 23 Janvier 1980.
Capture d_écran 2017-08-05 à 16.55.29Comme la mère d’Irina avait épousé en troisièmes noces le prince Alexandre Sergueïvitch Chegodaef (1889-1919) [photo ci-contre] qui adoptera Irina et celle-ci devenant l’épouse de Serge, quoi de plus normal que les deux hommes soient devenus amis, tous deux partageant en plus la même passion pour la musique !
Depuis son enfance, Alexandre adorait jouer de la balalaïka. En 1908, il s’était fait enrôler dans le célèbre orchestre populaire Andreëv qui partit l’année suivante se produire à Londres. Après le retour de l’orchestre, Alexandre resta quelque temps en Angleterre pour organiser des concerts et donner des cours particuliers de balalaïka à la Cour, à la demande du roi Edouard VIII d’Angleterre. Il ne rentra en Russie qu’en pleine guerre en 1916 et fut enrôlé comme volontaire dans un bataillon de réserve des Grenadiers de la Garde. On peut supposer que des liens d’amitié se nouèrent entre lui et Serge Soukhotine, les deux hommes ayant une passion commune pour la musique, sans oublier que Serge avait épousé la fille adoptive d’Alexandre.

ASSASSINAT DE GRIGORY RASPOUTINE

Le 20 décembre 1916 :

“Les journaux ont annoncé hier une nouvelle stupéfiante : Raspoutine a été tué ! On parlait depuis longtemps déjà de la nécessité d’éloigner cette force ténébreuse et voilà que surgissent de nouveaux décembristes qui se sont sacrifiés pour ce qu’ils croient être le bien de leur patrie,” note dans son journal Tatiana Tolstoï, alors que son propre beau-fils fait partie du complot. « Je suis triste et je pense que ce crime ne sera d’aucune utilité pour notre malheureuse Russie ; il marquera, par contre, d’une tâche ineffaçable la conscience de ceux qui l’ont accompli. « On a abattu un chien ». Oui, mais notre souverain en deviendra-t-il plus sage ? (…) La disparition de Raspoutine ne changera rien, je crois, mais il est possible et même probable que ce crime ne devienne l’étincelle qui fera éclater l’obscur mécontentement du peuple. »

Tania Albertini, fille de Tatiana Tolstoï, écrira des années plus tard que “l’assassinat de Raspoutine auquel prit part mon demi-frère Serge Soukhotine, bouleversa beaucoup ma grand-mère,” en préface à l’édition du journal intime de sa grand-mère Sophie Tolstoï, épouse de l’écrivain.
En résumé, Serge ne jouera qu’un rôle de comparse dans cette affaire au point qu’il n’a guère laissé de traces dans les archives de la police. Félix Youssoupov raconte que, comme la silhouette de Serge rappelait celle de Raspoutine, il était prévu qu’il enfilerait la pelisse du staretz sur sa capote militaire afin de donner le change aux passants éventuels, lorsque les conjurés sortiraient du palais après l’assassinat.

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C’est de Félix Youssoupov que viendrait l’idée d’un complot contre le « vieil homme » venu de Sibérie, celui qui avait trahi la confiance de la famille impériale et semé le trouble parmi la bonne société de la capitale. L’idée lui vint déjà en 1915 en discutant avec son épouse Irina Capture d_écran 2017-08-05 à 16.55.55[photo contre], nièce du tsar Nicolas II, ainsi qu’avec sa mère Zinaïda, farouchement opposée au tsarets. Cette dernière était d’ailleurs en froid avec l’impératice Alexandra Fedorovna qui n’avait rien voulu entendre à propos des critiques formulées contre Raspoutine. Mais trouver des volontaires pour mettre le projet sur pied n’était pas si simple, car la figure de Raspoutine était trop odieuse dans l’esprit de beaucoup de gens !
Félix se tourna alors vers deux de ses amis avec qui il pouvait partager ce secret, à commencer par le grand-duc Dimitri Pavlovitch dont il était proche depuis longtemps. Vint ensuite Serge Soukhotine qui était en traitement à l’hôpital pour sa blessure et auquel Zinaïda Youssoupov venait régulièrement rendre visite. Comme le grand-duc était au front, c’est avec Serge qu’auraient eu lieu les premières discussions, tant à l’hopital qu’au palais de la Moïka où il était convié à déjeuner. Une fois sorti de l’hôpital, le 6 juin 1915, Serge entame sa convalescence chez les Youssoupov à qui il présente son épouse Irina qui est reçue à bras ouverts. On dit aussi que les deux Irina qui avaient toutes deux pratiquement le même âge, étaient déjà amies et qu’elles passaient souvent de longues journées ensemble au palais de la Moïka. Quant à Félix et Serge, ils se connaissaient déjà depuis le temps où ils jouaient ensemble au tennis dans la propriété Yousoupov de Rakityanskaya, non loin de Kotchety. Les discussions se poursuivent. La décision de le tuer au revolver est tout d’abord prise puis un peu plus tard, lorsque le cercle des comploteurs s’élargit, l’utilisation du poison est préférée afin de mieux dissimuler toute trace de meurtre …

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Félix Youssupov écrit dans ses Mémoires que le principe même d’organiser un assassinat Capture d_écran 2017-08-05 à 16.56.19dans son palais de la Moïka [illustration ci-dessus] l’avait fortement déplu dans le sens « qu’inviter chez soi une personne qu’on a l’intention d’assassiner était totalement contraire à son éducation et ses principes. » Félix rend de fréquentes visites à Raspoutine ainsi qu’à l’une de ses ferventes admiratrices, Maria (Mounia) Golovine [illustration ci-contre] afin de gagner la confiance du tsarets. Serge et Félix se voit tous les jours pour discuter des détails pratiques de l’organisation en cours … Nuit du 16 décembre 1916 au quai de la Moïka, demeure du prince Félix Youssoupov. Outre Serge Soukhotine, les conjurés sont connus :

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de g. à d. : Félix Youssoupov ; le grand-duc Dimitri, cousin germain du tsar ; le député Pourichkévitch, le docteur Lazovert.

Les visiteurs peuvent aujourd’hui visualiser une parfaite reconstitution : au sous-sol du palais, deux mannequins de cire, Félix Youssoupov et Raspoutine, autour de la table sur laquelle sont préparés les biscuits au cyanure, les verres et le carafon de Madère [illustration ci-dessous de gauche]. Au rez-de-chaussée, une maquette représente la pièce où les autres conjurés attendent la fin du drame : le grand-duc et Pourichkévitch assis à une table, le docteur Lazovert prêtant l’oreille aux bruits venant du sous-sol, alors que Serge Soukhotine observe l’extérieur par une fenêtre [illustration ci-dessus de droite].

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Deux heures et quart du matin, les conjurés, Dimitri, Lazovert et Soukhotine chargent le corps dans une voiture et se dirigent vers l’île Krestowsky. La veille, Serge Soukhotine était venu reconnaître les lieux. Sur ses indications, le corps de Raspoutine est transporté sur la glace puis poussé dans l’eau. Mais dans la fébrilité du moment, personne ne s’aperçoit qu’une des galoches du cadavre est restée sur la glace : c’est la découverte de cet indice qui, trois jours plus tard, permettra à la police de retrouver le corps gelé du staretz.

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Capture d_écran 2017-08-04 à 10.36.16L’assassinat de Grigori Raspoutine ne changera rien au cours des événements de la guerre. La révolution couve depuis longtemps, comme le témoigne un entretien que Gleb Botkine [photo ci-contre], le fils du médecin de Nicolas II, assure avoir eu à Tsarkoë Selo le dimanche 11 décembre 1916 avec Serge Soukhotine, “officier très intelligent et très bien renseigné de l’Etat-Major” :

“Le soldat dans sa tranchée réfléchit, me dit Soukhotine, et voici ce qu’il pense : pourquoi l’a-t-on arraché à son village natal pour l’envoyer à la mort ? Mourir, c’est tout ce qu’il peut faire, car la plupart du temps on lui donne un bâton au lieu d’un fusil. Pourquoi a-t-il un bâton, alors qu’il devrait avoir un fusil ? Il réfléchit et d’autres l’aident à réfléchir. Et il conclut : trahison ! Eh bien, il aura bientôt fini de réfléchir et alors la police essaiera de l’arrêter avec des mitrailleuses. Mais n’oublie pas qu’un homme qui est resté pendant des jours et des jours, des mois et des mois sous le feu des canons allemands, on ne l’effraie plus avec des mitrailleuses de police. Ce n’est plus maintenant qu’on l’arrêtera !…”

Si Serge Soukhotine ne sera jamais inquiété dans l’assassinat de Raspoutine, la petite histoire débattra encore longtemps quant à savoir qui à tiré la balle fatidique ! Félix Youssoupov ? Trop maladroit ! Le grand-duc Dimitri ? Il aurait juré à son père sur ce qu’il avait de plus cher qu’il n’en était pas l’auteur. Le docteur Lazovert ? On a écrit qu’en tant que médecin, il aurait eu des remords de conscience. Il aurait remplacé le poison par une poudre sans effet nocif. Quant au député Vladimir Pourichkevitch, ses souvenirs datant de 1925 « Comment j’ai tué Raspoutine ? », sont peu crédibles car émaillés de fanfaronnades.

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Par contre, il est parfois suggéré qu’un « simple lieutenant » aurait très bien pu faire Capture d_écran 2017-08-04 à 10.36.30l’affaire… De toute manière, on épiloguera encore longtemps sur le sujet ! Il est assez symptomatique, conclut Maria Svidzinskaya dans sa biographie sur Serge Soukhotine que Félix Youssoupov ait attendu la mort de Serge pour publier ses propres mémoires sur toute l’affaire. Le prince Petr Petrovitch Isheev (1882-1926) [photo ci-contre] relate dans ses Souvenirs que dans le grand appartement que lui et sa femme occupaient pendant la guerre à Petrograd, le « jeune Chagodaev », de retour d’Angleterre, y avait loué une chambre. « Par Chagodaev, je connaissais le jour de l’assassinat ainsi que tous les détails sur l’affaire, » ajoutant que c’était Serge qui avait tiré mais que la décision avait été prise de garder le secret le plus absolu. Beaucoup de gens pensent et écrivent que c’est Pourichkevitch qui a tué Raspoutine. En fait, c’est Soukhotine qui a tiré et qui a tué Raspoutine … »

AFFAIRE RASMEKO

Suite à la forte réduction de production en métaux ferreux et non ferreux durant la guerre, un comité de fournitures de métaux du nom de RASMEKO avait été créé en 1915 afin d’assurer les besoins des usines productrices d’armement. A la révolution, RASMEKO intègre le Département Métallurgique du Conseil Economique Suprême pour la distribution des métaux. Les cadres sont fortement démocratisés par l’incorporation d’un quota de deux tiers de travailleurs et de paysans.
Capture d_écran 2017-08-04 à 10.36.39Et en corollaire, le nouveau régime tente de lutter contre la spéculation et le marché noir, phénomènes dûs au désordre économique causé par la guerre. Fin avril 1918, à la demande expresse du camarade économiste Maximilian Savelyev [photo ci-contre], Serge entre au Département des Métaux au sein du Conseil Economique Suprême. Un mois plus tard, il est nommé à la tête de la section des Métaux Etrangers et ensuite administrateur de RASMEKO, tandis que son ami Alexander Chagodaev en devient le secrétaire. Savelyev voyait en Serge quelqu’un qui avait déjà fait preuve dans sa fonction précédente au sein du Département des approvisionnements étrangers. Malheureusement, ces deux carrières sont bien vite interrompues.
En novembre 1918, sur base d’une dénonciation, Serge et Alexandre (et quelques autres) sont accusés de sabotage contre l’économie de l’Etat. C’est ce que l’on appellera l’affaire RASMEKO. Deux plaintes sont déposées. Elles ne reposent que sur le témoignage de deux directeurs d’usine. Pour l’un, Alexandre Chegodaev aurait refusé « par vengeance » une autorisation de production car l’usine n’aurait pas accepté de payer des « charges supplémentaires », comprenons des pots de vin ! A Serge Soukhotine, il est reproché d’avoir « brutalement » refusé une livraison de métal parce que le destinaire refusait de payer le supplément de prix demandé, sans que soit précisé la « manière dont ce supplément devait être payé ». Une tentative de corruption ?
Les prévenus sont mis aux arrêts durant 9 mois, de mi-juin au 22 novembre. Perquisitions dans les bureaux de RASMEKO et aux domiciles privés, brefs interrogatoires n’autorisant pas de réponse sauf par un oui ou un non, faux témoignages de personnes douteuses … La présomption de culpabilité est le fil conducteur de l’enquête menée par les autorités. Le procès se tient en séance publique, le 22 novembre 1918. Alexandre Chegodaev et Serge Soukhotine ne rencontrent leur avocat qu’une seule fois. Un autre accusé n’a même pas cette chance. Il est mort en prison, il avait vingt et un an.
Le tribunal juge que les charges contre les accusés sont parfaitement justifiées. La sentence tombe le 23 novembre 1918 : la peine de mort. La sentence, publiée dans les « Izvestia », doit être exécutée dans les 24 heures, à partir de 6 heures du matin. En attendant leur exécution, nos deux amis sont enfermés à la prison de Taganga.
Heureusement, à la requête de certains membres du Comité Exécutif Central, la peine capitale est commuée le lendemain en prison à vie. On peut expliquer ce changement dans l’attitude du Ministère Public par une sorte de reconnaissance implicite des compétences professionnelle des deux hauts fonctionnaires de RASMEKO … Et pour la petite histoire, on apprendra que les deux accusateurs directeurs d’usine seront à leur tour condamnés en tant que « gros spéculateurs et ennemis du peuple » !

PRISON DE TAGANKA

Les deux amis sont emprisonnés dans la tristement célèbre prison de Taganka à Moscou. Déjà avant la Révolution, cette prison aura servi à interner des prisonniers politiques et ensuite, lors des grandes purges staliniennes, les « ennemis de l’Etat ». Rasée dans les années 1950, la prison de Taganka [illustration ci-dessous] est aujourd’hui immortalisée par de nombreux poèmes et chansons reflétant une periode douloureuse du régime communiste.

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Serge et Alexandre occupent des cellules différentes, l’un la 164, l’autre la numéro 15 mais les portes restent pratiquement ouvertes toute la journée et il était possible de circuler librement dans la prison. Durant leur temps d’emprisonnement et avec l’autorisation des autorités pénitentières, Serge et Alexandre se lancent dans la création d’un orchestre d’instruments populaires, constitué de prisonniers volontaires. Si pour Chegodaev la musique était pratiquement devenue une profession, pour Soukhotine c’était une passion depuis l’enfance : il jouait de la guitare, aimait la musique tzigane et s’était essayé à la composition de chansons.

De plus sa femme Irina, musicienne virtuose, l’avait régulièrement invité à ses concerts et était pour lui une excellente source d’inspiration. L’orchestre compte 14 à 18 prisonniers de toutes catégories sociales et d’âges différents. Ils sont condamnés pour crimes de vol, vagabondage, assassinat, désertion et corruption. Le plus jeune a 15 ans, le plus ancien 85 ans. L’orchestre connaît un franc succès, participe à de nombreux concerts et rassemblements organisés en commémoration des différentes dates anniversaires de la Révolution. Il est d’ailleurs fort probable que la durée d’emprisonnement des deux comparses aura été réduite grâce à cette activité artistique jugée hautement patriotique par les autorités.

Extrait des Souvenirs de Tatiana Tolstoï, le 16 février 1919 (ns) :

« Je suis allée à Moscou pour visiter mon beau-fils Serge, enfermé à la prison de Tagansskaïa. Je l’ai trouvé de très bonne humeur. Il m’a décrit de cette manière simple et franche propre aux Soukhotine, les sentiments qu’il a éprouvés lorsqu’on l’a condamné à mort. »

En inaugurant ainsi une nouvelle étape dans sa vie mouvementée, Serge est qualifié de « prisonnier exemplaire » par l’Administration. On le voit remplir les activités les plus variées : réparateur chauffagiste, infirmier lors d’une épidémie de typhus, chef des travaux au jardin de la prison, soigneur de lapins, professeur, adjoint aux travaux de l’imprimerie … Pour la direction la prison, la présence de prisonniers « bourgeois » était fort utile pour améliorer le niveau d’éducation des autres prisonniers issus de la masse populaire, « nouvelle » mais peu instruite ! Grâce à son statut de prisonnier modèle (tout comme pour son ami Alexandre Chegodaev), Serge voit sa peine graduellement réduite, passant à 5 ans puis 3 ans. Il obtient même des congés pénitentiaires, ce qui lui permet d’aller retrouver [photo ci-dessous] sa fille Natalia. Âgée de 3 ans, elle réside en dehors de Moscou et il ne l’a plus vue depuis 2 ans …

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Capture d_écran 2017-08-04 à 10.37.26Finalement, Serge sort de prison le 16 février 1921, tandis que Alexandre Chegodaev [photo ci-contre] continue de pratiquer, mais en dehors du régime de détention, son activité orchestrale dans différentes unités des prisons du N.K.V.D. Il mourra paisiblement à Moscou, le 27 août 1939.
Fort heureusement, malgré la malnutrition et les conditions sanitaires insalubres à l’origine de différentes maladies dont l’anémie et la tuberculose, le médecin de la prison aura noté que l’état de santé de Serge sera resté satisfaisant, lui qui était prédisposé de naissance à la tuberculose !  

GÉRANT DE YASNAÏA POLIANA

Amnistié le 16 février 1921 puis libéré, Serge arrive à Yasnaïa Poliana où il trouve refuge tout comme d’autres familiers des Tolstoï, déboussolés par la Révolution. Alexis Soukhotine, d’un an plus jeune que son frère Serge, arrive de Saint-Petersbourg « amaigri, le visage émacié et affaibli par la malnutrition … »
Depuis mai 1919, le domaine de feu Léon Tolstoï avait été reconnu « trésor national de haute valeur culturelle », protégé par l’Etat et placé sous la juridiction du Commissariat aux Musées. Le 25 mai 1921, Serge est nommé gérant de la propriété de Yasnaïa Poliana alors que la veille, Sacha Tolstoï, conservatrice des lieux et amie d’enfance de Serge avait signé une pétition pour obtenir sa nomination.
Par un paradoxe très inattendu, Serge doit sa nomination à la femme de Léon Trostky, Natalia Ivanovna Sedova [photo ci-dessous], à l’époque responsable du Directoire Général des Musées, émanation de la nouvelle organisation bolchevique pour la protection des Monuments et des Arts.

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Manifestement, par sa bonne connaissance des lieux et de la famille Tolstoï, Serge avait été jugé « apte à la fonction ». Un document datant du 1er novembre 1921 sur papier à lettres officiel de Yasnaïa Poliana, signé de la main d’Alexandra (Sacha) Tolstoï, indique que cette dernière « autorise Serge Mikhaïlovitch Soukhotine, gérant de la propriété de Yasnaïa Poliana, à conduire en son nom toutes négociations, de conclure des accords ou des protocoles avec toutes institutions ou organismes, publics ou privés et ce, avec validité jusqu’au 1er février 1922.
Manifestement, après ses quelques années d’emprisonnement, cette nouvelle activité va relancer sa vie d’autant plus qu’à l’automne 1921, Serge se remarie avec Sophie Andreïevna Tolstoï, une petite-fille de Léon Tolstoï de dix ans plus jeune que lui, qu’il aura rencontrée durant ses congés pénitentiaires.  

MARIAGE AVEC SOPHIE ANDREÏEVNA TOLSTOÏ  

x (b) 19.10.1921 comtesse Sophie Andreïevna Tolstoï
° 12/25.4.1900 Iasnaïa Poliana + 29.6.1957 Moscou enterrée parmi les Tolstoï à Kotchaki
Petite-fille de Léon Tolstoï par son fils André, mari d’Olga Constantinovna Dieterichs, belle-soeur de Vladimir Grigorievitch Tchertkov, le confident et ami de Léon Tolstoï. Sophie porte le prénom de sa grand-mère paternelle qui fut sa marraine. Elle et son frère Ilya sont indissociablement liés à la photo [ci-dessous] les représentant avec leur grand-père leur racontant l’histoire du concombre.

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Ce second mariage de Serge avec Sophie Tolstoï est de courte durée car même pas trois mois plus tard, en janvier 1922, il est de victime d’un accident vasculaire cérébral, entraînant une paralysie complète. Selon toute évidence, ce nouvel AVC trouve son origine dans sa blessure de guerre et les ennuis de santé qui suivirent, d’autant plus qu’il se plaignait souvent d’insupportables maux de tête. Le diagnostic de l’hôpital est sans équivoque : « thrombose des vaisseaux cérébraux entraînant une paralysie du côté droit Capture d_écran 2017-08-04 à 10.38.00avec lésion des jambes, des bras et de la langue ».
Comme Serge n’est plus en état d’assumer ses fonctions dans la propriété de Yasnaïa Poliana, c’est son beau-frère le prince Nicolas Léonidovitch Obolensky (dont la première épouse était Macha Tolstoï, la fille préférée de l’écrivain) qui reprend la gérance du domaine de feu Léon Tolstoï.
Pour couronner le tout, en juillet 1925, sans même avoir attendu un divorce avec Serge ni un décès éventuel, Sophie Tolstoï se remarie avec le poète Serge Essénine, devenant ainsi sa 4ème femme [photo ci-contre  – 1925]. Et c’est en lisant son journal que Serge apprendra le remariage de son épouse ! Poète maudit, Essénine mettra fin à ses jours le 28 décembre 1925. En 1948, Sophie Tolstoï se remarie une troisième fois avec un certain Alexander Timrot …

SA MORT EN FRANCE

Capture d_écran 2017-08-04 à 10.38.11Bien que Tatiana Lvovna et Olga Dieterichs, les deux belles-mères de Serge, prennent ses problèmes de santé en main, elles ne sont malheureusement d’aucun secours, la médecine russe de l’époque n’offrant ni médicament ni moyen de guérison. Serge est tout d’abord hébergé quelque temps dans l’appartement d’Olga sur le boulevard Prechistenskie [illustration ci-contre] puis elles sont obligées de le placer, d’abord dans une clinique ensuite, faute de moyens, dans une maison pour indigents. En 1925, Serge subit une nouvelle attaque cérébrale. C’est alors que la décision est prise de l’envoyer à Paris où l’on a entendu parler d’une méthode de traitement similaire au vaccin contre la malaria. L’affaire se règle assez rapidement, grâce à Capture d_écran 2017-08-04 à 10.38.19des dons d’argent de quelques amis proches. Parmi ceux-ci, Nikolaï Karlovitch von Meck [illustration ci-contre] ou sa fille Galina (on ignore en fait lequel des deux). Les archives de la prison de Taganka font état d’une intervention de Serge en faveur Nikolaï lorsque celui-ci était lui aussi emprisonné. Ancien président de la Société des Chemins de Fer Kazan-Moscou, Nikolaï von Meck était le mari d’Anna Lvovna Davydoff, petite-fille du décembriste Vassili Davydoff. Catherine Davydoff, une autre fille du décembriste, était l’épouse de Vladimir Peresleni dont descend Hélène Bazilevski, épouse de Léon Soukhotine, frère de Serge …
C’est Tania Tolstoï-Soukhotine qui prend l’initiative d’envoyer son beau-fils Serge à l’étranger. Elle écrit à Félix Youssoupov qui lui répond immédiatement : « Amenez-le-moi ! » Pour l’aider dans cette tâche, elle prend contact avec Valentin Boulgakov, le dernier secrétaire en date de son père Léon Tolstoï. Boulgakov n’appréciait pas Serge. Et pour cause, il avait eu une amourette avec Solphie Andreïevna Tolstoi, avant que celle-ci de devienne l’épouse de Serge. L’affaire avait été clôturée à la suite d’une intervention de Sophie et de sa mère. Tania lui adresse une lettre :

« Cher Valentin Fedorovitch, j’ai une grande, très grande requête à vous adresser ! Mon pauvre beau-fils Serge va en France. Il se rend à Paris pour se faire soigner ou pour y mourir dans de meilleures conditions que celles que l’on peut lui offrir ici. Jusque Prague (le coût du voyage était moins élevé que via Berlin), il aura un accompagnateur tchèque (de Prague à Paris, il lui en faudra un également). La question est de savoir comment il va s’en sortir à Prague durant un jour ou plus avant de se débrouiller pour rejoindre Paris. Comme vous le savez, il est complètement désemparé, incapable de se débrouiller, ce qui pourrait causer des accidents. »

Plus tard, Valentin Bulgakov [photo ci-dessous aux côtés de Léon Tolstoï] va relater dans ses mémoires :

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« J’ai rencontré l’un de mes rivaux : il était complètement « ramolli », sa bouche bavait de la salive, son aspect était celui d’un idiot, il parlait d’une manière confuse et incompréhensible. Mes soucis se limitèrent au minimum. »

Le « minimum » était d’accompagner Serge jusqu’à Prague mais il ne semble pas qu’il l’ait fait … Le 13 mars 1925, un agent diplomatique tchèque prend Serge en charge dans le train jusque Paris. Lors d’un arrêt en gare de Varsovie, l’homme sort pour se dégourdir les jambes. Rejoignant son compartiment, il constate que Serge n’y est plus et qu’il s’est évaporé dans la nature. Le train ne peut attendre et repart avec le diplomate. Plus tard dans la nuit, Serge est retrouvé errant dans les rues de la capitale. Il trébuche, il est pris pour un ivrogne et amené à l’hopital. Quelques jours plus tard, alors que son état s’est amélioré, il est en mesure de reprendre la direction de Paris, sans que l’on sache s’il est accompagné ou non.
Tania Tolstoï venait elle aussi de réussir à quitter la Russie. Elle se trouvait à Prague où elle réceptionna Serge. Le jour de son arrivée, elle envoie deux lettres à Moscou à l’attention d’Olga et de Sophie :

« Il est maintenant huit heures du matin. Serge a dormi dans la pièce à côté qui est séparée de la nôtre par une salle de bain. Tatiana, elle était en larmes hier-soir, dort sous une couverture. C’est extrêmement difficile de s’occuper de lui car il est constamment en mouvement, ne sachant pas où il est. Hier, après avoir été à la toilette, il ôta ses souliers avant d’aller se coucher puis disparut. Après l’avoir cherché partout, on l’a finalement retrouvé dans l’escalier. Le concierge le tenait par le bras. Je lui recherche un accompagnateur pour le conduire à Paris avec la promesse de payer le billet de train à celui qui pourra le faire. Je compte envoyer une carte postale à Paris pour qu’on puisse l’y accueillir et je lui glisserai l’adresse dans sa poche. »

Serge Soukhotine décède deux mois et demi plus tard, le 4 juin 1925, dans la banlieu d’Orly non loin de Paris. Il a à ses côtés son ami Félix Youssoupov ainsi que sa première épouse Irina qui avait appris la maladie de son ex-mari. Détail curieux, Valentin Boulgakov raconte dans ses Mémoires que Félix aurait pris à sa charge le coût d’un traitement à base de Salvarsan, un médicament dérivé de l’arsenic efficace contre la syphilis …
En annonçant la mort de Serge, Tania Tolstoï écrivit à Olga Constantinova ainsi qu’à sa fille Sophie Andreïevna Tolstoï :

« Ma très chère petite Sophie, Serge a été enterré aujourd’hui. Il est décédé hier, le 4 juin à 6 heures de l’après-midi. Je ne l’avais plus revu avant sa mort. La dernière fois, il avait une voix rauque, son aspect n’avait pas changé. Il nous reconnut, Tania et moi. Toutes heureuses, nous lui posions des questions mais il ne nous répondait pas. Le 2 juin, j’appris que son état s’était aggravé et que les médecins ne lui donnaient plus que deux à trois semaines à vivre. Je devais donner le lendemain une importante conférence, je préparais à manger pour les trois quatre jours à venir, j’avais le coeur lourd. Dès que cela fut terminé, je partis pour Orly où me dit que Serge était décédé la veille. Il n’a pas souffert, il est mort dans son sommeil. Il eut coup sur coup plusieurs syncopes, la fin est arrivée très rapidement. Les derniers jours, il n’était plus conscient. Pourtant, il eut quelques accès de colère, jetant la tasse qu’on lui tendait ou déchirant ses photos, sauf celle de sa mère. »

Une autre lettre de Tania Tolstoï laisser penser que Serge aurait été fort troublé par la trahison de sa deuxième femme Sophie Tolstoï. Celle-ci écrivait pourtant à un ami, le 16 mars 1925 :

« Je viens d’entrer dans une période très difficile de ma vie, avoue-t-elle après le départ de Serge pour la France. Mon mari s’en est allé soit pour guérir soit pour mourir là-bas. Abandonner mon mari à l’étranger … il est très malade, tous ses problèmes reposent sur ma mère et moi-même. Vous ne pouvez pas vous imaginer ce que cela signifie de partir à l’étranger, c’est très difficile. Même si nous étions plutôt des étrangers l’un pour l’autre, son départ est pour moi un chapitre lourd à supporter et très significatif dans ma vie. »

Et ce sera par les journaux qu’elle apprend la mort de Serge : « Mon mari, non ce n’est pas vrai, c’est un mensonge ! » se serait-elle écriée. On sait que Serge était resté très attaché à deux personnes en particulier, sa mère Nathalie Mikhaïlovna de Bode et sa fille Nathalie Sergueïevna [photo ci-dessus]. Alors qu’il avait déchiré les photos de tous ses autres proches, il avait précieusement gardé leurs images …  

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L’AFFAIRE BONHAMS

L’affaire Bonhams et le « général Soukhotine » ou … comment réécrire l’histoire ! Avril 2008, la salle de vente Bonhams à Londres annonce sur son site Internet la mise aux enchères d’objets d’art d’une provenance totalement fantaisiste :

« acquired from the private collection of general Sukhotine in Belgium, 1952. The general, then a lieutenant in the Russian army, was involved with the murder of Rasputin on 19th November 1916. He was Jacques Desenfans’ neighbour ».

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Lot 127 is a large 19th century silver-plate and gilt belt [illustration ci-dessus de gauche] buckle from the Caucasus. The rectangular buckle, made to be detachable comes in two parts and is decorated with a geometric motif with three diamond-shaped raised bosses on each section. Lot 297, a group of three powder horns [illustration ci-dessus de droite] from the Caucasus made in the 18th century, including a silver and niello powder horn with incised floral motifs and ivory neck ; an ivory powder horn carved with trefoil motif, the steel mounts with gold damascening decoration ; a steel powder horn with bands of gold floral decoration. Issu d’une famille ayant fait fortune dans l’industrie textile, Jacques Desenfans (1920-1999) était un collectionneur belge d’objets d’art anciens consacrés aux arts islamique, indien et d’Asie du Sud-Est. Une riche collection dont certaines pièces furent présentées aux Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles et qui fit par ailleurs l’objet en 1969 d’une exposition à l’occasion de laquelle le Shah d’Iran fit une visite personnelle.
Certains media russes se font également l’écho de cette vente « historique » : « les objets de l’assassin de Raspoutine passeront sous le marteau » – Soukhotine, le « tueur du mauvais génie » …
Et Bonhams de pratiquer un marketing historico-commercial fort agressif : Bonhams next Indian and Islamic art sale (…) includes a number of fascinating reminders of a murder that remains something of a mystery to this day, the killing of the Russian monk, Rasputin.

K*S* of Bonhams Indian and Islamic Department comments :

“These items might not have a huge financial value, but in historic terms they are fascinating and very valuable because of their previous owner’s involvement in one of the most notorious murders of the early 20th century. The mysterious monk, Grigory Capture d_écran 2017-08-04 à 10.38.58Efimovich Rasputin, a peasant who claimed powers of healing and prediction, had the ear of Russian Tsarina Aleksandra, wife of Tsar Nicholas II. The aristocracy could not stand a peasant in such a high position and many peasants could not stand the rumours that the tsarina was sleeping with such a scoundrel. Rasputin was seen as « the dark force » that was ruining Mother Russia. To save the monarchy, several members of the aristocracy attempted to murder the holy man. On the night of December 16-17, 1916, they tried to kill Rasputin. The plan was simple. Yet on that fateful night, the conspirators found that Rasputin would be very difficult to kill.
The conspirators tried to poison him and when that did not appear to be working they clubbed and shot him and dropped his body into the Neva River. Three days later, the body of Rasputin, poisoned, shot four times and badly beaten, was recovered from the river and an autopsy was undertaken. The cause of death was hypothermia. His arms were found in an upright position, as if he had tried to claw his way out from under the ice. In the autopsy, it was found that he had indeed been poisoned, and that the poison alone should have been enough to kill him. »

Capture d_écran 2017-08-04 à 10.39.07La vérité historique a ses droits : Serge Soukhotine n’a jamais été général (le dernier général Soukhotine, Nicolas Nicolaïevitch [illustration ci-contre] est mort en 1918), il n’a jamais vécu en Belgique et n’a donc jamais pu être un voisin de Jacques Desenfans à qui il aurait vendu ces objets en 1952, alors qu’il est décédé à Paris en 1926 !
Par contre, suivant le principe qu’il n’y a pas de fumée sans feu, il n’est pas impossible que l’origine de ces objets puisse avoir un lien avec la fabuleuse collection d’Alexandre Petrovitch Bazilevski (1829-1899)  assez ressemblante à celle de Jacques Desenfans, collection rachetée en 1884 par le tsar Alexandre III au profit du Musée de l’Ermitage de Saint-Petersbourg.
Capture d_écran 2017-08-04 à 10.39.14Alexandre Petrovitch Bazilevski [illustration ci-contre] n’est autre que le grand-père d’Hélène Bazilevski, cette dernière étant l’épouse de Léon Soukhotine, le propre frère de Serge. Aujourd’hui encore, on retrouve quelques menus objets du même style, sans grande valeur, oubliés dans un tiroir de certains descendants Soukhotine. Arrivés en Belgique vers 1924, après avoir vécu quelques années à Belgrade, Léon Soukhotine aurait-il été en contact avec Jacques Desenfans ? Mais comme il est décédé en 1948 et que le contact daterait de 1952, la question reste ouverte …  D’autre part, la réponse finale de Bonhams à Londres n’apporte aucun éclaircissement :

« we used Jacques Desenfans’ handwritten notes on his pieces to form our provenances. He did small drawings of the items and usually said where he had got them from. We had no reason to disbelieve it. »

PHOTOS MYSTÈRES

Lorsqu’on effectue des recherches sur Internet sur Serge Mikhaïlovitch Soukhotine, on tombe sur l’affaire Raspoutine avec habituellement la photo de Serge en militaire avec képi [photo ci-dessous du haut à gauche]. La photo de droite, montrant Serge avec sa seconde épouse, Sophie Andreïevna Tolstoï, date de 1921. Cette photo est apparue récemment sur Internet et proviendrait du musée Tolstoï à Moscou. La phrase manuscrite au bas de la photo indique « S.A. Tolstoya (1ère à droite), S.M. Soukhotine (…) Moscou 1921 ». Quant aux deux autres dames, bien que leurs noms ne sont pas connus avec certitude, celle du mileu pourrait être Zoé Dmitrïevna Platonova, épouse d’Illya Andreïevitch Tolstoï, frère de Sophie. Les deux photos du haut montrent clairement le même Serge. Elles semblent avoir été prises à la même époque, alors qu’entretemps Serge était passé par la case prison.

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L’illustration du bas à gauche représente Serge avec sa fille Natalia, née en 1917, et date également de 1921, probablement après sa libération de prison, le montrant affaibli et amaigri. La photo de droite le montre en tenue militaire avec les deux décorations reçues après sa blessure ; elle daterait en principe de 1916. Sur ces deux photos, Serge est clairement le même. Pourtant, malgré une très vague similitude, le Serge du haut ne ressemble pas au Serge du bas. Mystère !…

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.5.(a).1. Natalia Sergueïevna Soukhotine
° 1917

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Félix et Irina Youssoupov sont ses parrain et marraine. Son épouse Irina et lui-même sont de grands amis du ménage Soukhotine, témoin cette annotation datant de 1917 dans le Livre d’Or des Youssoupov :

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Alors que Serge est encore en prison, sa mère Irina l’abandonne et quitte la Russie en 1923 pour aller refaire sa vie en France. Natalie reste sous la garde de sa belle-mère Sophie Tolstoï, la seconde épouse de son père.
x 1936 Matthew Nikitich Vasin

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.5.(a).1.1. Vladimir Matveïtch Vasin
° 1937
Compositeur de musique variée ; un descendant de Serge Soukhotine qui malheureusement ne répond pas aux mails qu’on lui envoie …

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1.1.5.(b).11.2.8.7.4.6. Alexis (Alia) Mikhaïlovitch Soukhotine (sp) [photo ci-dessous]
° 7.11.1888 Kotchety + 21.2.1942 Oulianovsk

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Yalta 1901 : Michel Soukhotine – Lisa Obolensky – Tatiana Tolstoï – le jeune Alexis Mikhaïlovitch Soukhotine & Macha Obolensky

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A Yalta : le jeune Alexis Mikhaïlovitch Soukhotine à droite, aux côté de Sophie Tolstoï

Il fait partie de la promotion 1911 du Lycée impérial Alexandre. En 1914, il termine ses études de droit à Saint-Pétersbourg et débute une carrière diplomatique. Il assumera des missions au Monténégro, en France et en Italie. Rentre en Russie à la révolution d’octobre, vit un moment à Toula et travaille au commissariat du Peuple aux Affaires Etrangères.  En 1921, il s’installe à Moscou et travaille comme responsable de l’étude de la presse étrangère. En 1922, il entre à l’Institut d’Orientalisme de Moscou (Institut Vostokovedenija) et est diplômé en 1925 en tant que spécialiste de l’ourdou, de l’arabe du bengali. Il enseigne jusqu’en 1928 l’ourdou, écrit des articles sur la langue et la littérature bengali pour « l’Encyclopédie littéraire ».
Il participe ensuite à l’élaboration d’une thèse sur les écritures de l’U.R.S.S avec le linguiste N. F. Yakovlev. En 1933, il est professeur à l’Institut Pédagogique de Moscou où il donne des cours d’introduction à la linguistique. Il sera chercheur et secrétaire du Comité des Langues de l’université communiste des Travailleurs de l’Orient, ainsi que secrétaire exécutif du Groupe « Culture et la Littérature d’Orient. »

Quelques souvenirs de ses anciens élèves :

« Well, it’s jokingly been said, but I say that Sukhotin came from another world, from the world of the Russian nobility. Vladimir Nikolaevich Sidorov joked : « He’s the corps graduated they have industrial practice was in the Winter Palace ». Really like not pages’ case, and law School, the same a privileged educational institution. So, he graduated from all sorts of privileged institution, became a diplomat. His last place was in Paris – not the main the Ambassador, of course, but in diplomatic the representation in Paris of the Russian Empire. After the October revolution, he, unlike many returned home and became a scientist. Again I will say : what languages he didn’t know ! It was his native language French, English and German, he studied in childhood. And in addition, he completed a fellowship in Hindustani and other languages of India, worked in this region, taught Hindustani. It turned out, that Polivanov (qui fut Capture d_écran 2017-08-04 à 14.46.49également professeur de Léon Soukhotine), the brilliant Evgeny Dmitrievich Polivanov [illustration ci-contre], sent to Eastern Siberia, to study Turkic languages and dialects. Sukhotin becomes a year or two the specialist in Turkic languages and travels to Eastern Siberia to describe the zoning of the Eastern Turkic languages. Sukhotin went alone and wrote work on East Asian Turkic languages. Now scholars highly appreciate it. Translated from French to Russian « Course of General linguistics » Saussure « Language » Sephira with English. Brilliant translations. It was a man of incredible vitality. So I can say about him : he jumped, he held out his hand, he was surprised to turn around all body. It’s never been sharply vulgar, but it was always scary dynamic. The amazing plasticity of movement, well, incredible dynamics, liveliness amazing ! »

Ses ouvrages sont consacrés à la linguistique slave, indo-iranienne et turque. Il traduira notamment en russe le « Cours de linguistique générale » du célèbre linguiste genevois Ferdinand de Saussure. Il est également considéré comme l’un des fondateurs de « l’école phonologique de Moscou ». Dans les années 1930, il aura participé à l’élaboration des alphabets pour les peuples de l’U.R.S.S.
Il mourra sur la route en février 1942 d’un accident vasculaire cérébral, alors qu’il se rendait à une conférence qu’il devait donner à l’Institut pédagogique d’Oulianovsk.

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.7. Tatiana Mikhaïlovna Soukhotine
° 28.2.1891 + 17.3.1892

1.1.5.(b).11.2.8.7.4.8. Théodore (Fedor/Dorik) Mikhaïlovitch Soukhotine
[photo de droite : aux côtés de son frère Serge]
° 7.10.1895 Kotchéty + 14.3.1921 décédé de la tuberculose.
Inscrit avec ses frères à la noblesse de Toula et à celle d’Orel.

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Dorik aux côtés de son (demi-)frère Serge

Souvenirs de Serge Obolensky à propos de l’oncle Dorik :

C’est Tatiana Lvovna qui m’a expliqué bien plus tard, que le dernier frère de maman, Dorik (Théodore) n’était pas le fils de notre grand-père, ce qui explique pourquoi on nous disait toujours que maman a dû s’occuper très jeune de son frère cadet « orphelin ». Le mot « orphelin » était toujours souligné, il s’est bien imprimé dans ma mémoire. D’autre part, notre grand-père n’était pas un mari très fidèle. Un jour, il fut obligé de dire à son fils Serge qu’il ne devait pas épouser une jeune fille voisine car elle était sa demi-soeur !

Souvenirs d’Hélène Bazilevski, femme de Léon Soukhotine :

En juillet, la première guerre mondiale éclata. Un cuirassé allemand, ayant forcé le Bosphore, bombardait les côtes. Dorik passait l’été avec nous ; il s’engagea immédiatement dans l’armée. Nous ne l’avons plus jamais revu ! Il mourut quelques années plus tard en Italie ; quand Tatiana Lvovna décéda à son tour, elle fut enterrée dans la même tombe au cimetière de Rome.

Capture d_écran 2017-08-04 à 14.47.18

1.1.5.(b).11.2.8.8. baronne Hélène Lvovna de Bode
° 1.5.1826 + Moscou 9.3.1862 enterrée au cimetière de Spaso-Androneva à Moscou
Demoiselle d’honneur de l’Impératrice.
Extrait des Souvenirs de Fedor Bouslaev, précepteur des enfants de Lev Carlovitch :

Durant nos séjours d’été à Metcherskoïe, nous formions un choeur avec la fille aînée – elle avait une belle voix et adorait chanter – et les voisins de la propriété, des ténors et des basses, dont le jeune prince Obolensky. Plus tard vint s’ajouter Elena Lvovna avec sa splendide voix de contralto, faisant son effet à chaque concert. Et on entendait quelque fois résonner dans ce choeur familial la voix basse de son frère Mikhaïl. De deux ans plus âgée que sa jeune soeur Alexandra, Elena Lvovna avait de l’attrait et du charme mais exprimé d’une manière différente. De plus grande taille, elle se distinguait par la fluidité de ses mouvements et un maintien tout en délicatesse. Son aspect général reflétait le calme et la sérénité, une sorte de paresseuse bienveillance qui fait le charme et la beauté d’une jolie femme. Avec le temps, sa nature se dota encore d’un charme supplémentaire lorsqu’elle chantait d’une incroyable voix de contralto.  

Capture d_écran 2017-08-04 à 14.47.57

x 19.4.1846 André Illitch Boratinsky
° 10.11.1813 + 24.3.1889
Lieutenant, propriétaire dans le district de Kirsanov. Peu de temps après, Elena Lvovna se maria avec Andreï Ilyitch Boratinsky, le neveu du fameux poète (Eugène Boratinsky). Elle vécut très heureuse avec son mari dans leur propriété quelque part dans le Sud, loin de Moscou. Tous deux étaient passionnés de musique. Comme vous le savez déjà, elle chantait avec sa fantastique voix de contralto alors que lui l’accompagnait au violon. Le soir, ils avaient pris l’habitude de rassembler des gens du voisinage amateurs de musique, pour jouer des arrangements en quartets, duets et trios ou pour chanter. Elena Lvovna décéda en 1862 à seulement trente-six ans, laissant trois fils et quatre filles. Son mari resta vivre sur sa propriété et mourut fin des années ’80.

1.1.5.(b).11.2.8.8.1. Léon Andreïevitch Boratinsky
° 9.3.1848 + 1907
Capture d_écran 2017-08-04 à 14.48.08Conseiller d’Etat ; en 1874, après son graduat au département de Physique et de Mathématiques de l’université de Moscou, il entre au service du conseil provincial de la ville de Moscou pour effectuer des missions spéciales. Il sera ensuite vice-gouverneur de Moscou du 29 novembre 1890 jusqu’au 13 octobre 1902. Du 28 décembre 1891 au 12 septembre 1892, il remplira les fonctions du gouverneur civil de la province de Moscou en remplacement de Dmitry Sergeyevitch Sipyagin, absent pour raisons de santé. Ayant fort apprécié son travail, le grand-duc Serge Alexandrovitch intervint en sa faveur.
x (a) Catherine Ivanovna Timiriaseff
° 1852 + 1921
Professeur et traductrice, nièce de Clément Arkadyevitch Timiryazev [1.1.5.(b).11.2.1.4.1.], descendant de Clément de Bode [1.1.5.(b).11.2.1].
x (b) Elisabeth Sergueïevna Soukhotine
° 28.7.1851 + 25.2.1902
Belle-soeur de Maria Mikhaïlovna de Bode [1.1.5.(b).11.2.8.7.4.]
x (c) Soja (Zoé) Ivanovna Koroschaline

1.1.5.(b).11.2.8.8.1.(c).1. Andreï Lvovitch Boratinsky

° 1904 (sp) 1.1.5.(b).11.2.8.8.1.(c).2. Roman Lvovitch Boratinsky
° 1905 Moscou + 9.5.1938 (sp)
Chef du Département de la planification du Bureau de Kalinin ; arrêté le 4 novembre 1937 et condamné par le collège militaire de la Cour suprême de l’URSS le 9 mai 1938 puis fusillé. (Source : Le livre de la mémoire de la région de Kalinin).

1.1.5.(b).11.2.8.8.1.(c).3. Nathalie Lvovna Boratinsky
x Wladimir Nicolaïevitch Aponizky

Capture d_écran 2017-08-04 à 14.48.191.1.5.(b).11.2.8.8.2. Sophie Andreïevna Boratinsky
° 8.10.1850 [photo ci-contre]
x 4.1873 prince André Mikhaïlovitch Obolensky
° 8.3.1850 + 1898 Sichovka, Saratov district (sp)

1.1.5.(b).11.2.8.8.3. Ilya Andreïevitch Boratinsky
° 7.6.1852 + 1911
Après avoir navigué pendant quatre ans dans des pays lointains, il fut promu enseigne de marine ; lieutenant de marine en retraite ; il hérita de son père d’un tiers d’Iliinovka, district de Kirsanov et acquit un tiers de son frère. En 1897, il avait des terres dans le district de Saranks ; en 1900, il avait 1.258 ha à Iliinovka.
x baronne Barbara Andreïevna de Bode
Sa cousine, fille de André (Henri) Andreïevitch de Bode [1.1.5.(b).11.2.2.2.6.]

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Armoiries Boratinsky – Bode     –     Ilya Andreïevitch Boratinsky

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.1. Alexandre Illitch Boratinsky

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.2. Nicolas Illitch Boratinsky

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.3. Hélène Illievna Boratinsky

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.4. Elisabeth Illievna Boratinsky
+ after 1916

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.5. Marguerite Illievna Boratinsky
+ after 1916
Professeure de français dans un lycée de filles.

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.6. Nathalie Illievna Boratinsky
+ after 1916

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.7. Lydia Illievna Boratinsky

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.8. Anna Illievna Boratinsky

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.9. Marie Illievna Boratinsky

1.1.5.(b).11.2.8.8.3.10. Barbara Illievna Boratinsky 

1.1.5.(b).11.2.8.8.4. Michel Andreïevitch Boratinsky
° 23.9.1855 + 1924
Officier de grenadiers

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x (a) sa cousine Marie Mikhaïlovna Boratinsky [photo ci-dessus]
° 1857 + 7.7.1890
x (b) Olga Alexeïevna Chemtschushnikoff
° 1859
Fille du poète Alexei Mikhaïlovitch Chemtschushnikoff (1821-1908) [photo ci-dessous]

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Olga entourée de ses deux fils Serge et Wladimir

1.1.5.(b).11.2.8.8.4.(a).1. Hélène Mikhaïlovna Boratinsky
° 1880 + 1968
Son éducation se fait à l’Institut Alexandrinsky de Tambov, école pour jeunes filles de la noblesse, où elle termine avec une médaille d’or.

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Institut Alexandrinsky – Hélène au côté de son grand-père maternel Alexei Chemtschushnikoff

Ensuite, grâce à ses talents d’institutrice, elle donne cours à ses jeunes frères mais la guerre russo-japonaise l’incite à servir sa patrie en devenant infirmière. Choisissant de rester célibataire, elle rejoint la Croix-Rouge, complète ses cours dans la communauté Kaufman de Saint-Pétersbourg et débute dans un hopital militaire de la ville d’Irkutsk. La guerre terminée, Hélène revient à Tambov et cherche à nouveau à mettre ses talents d’institutrice en pratique en rejoignant l’Institut Alexandrinsky. A cette époque, son père Michel Andreïevitch mène une vie publique active : il sert à l’assemblée provinciale de la noblesse (Zemstvo), il est membre du directoire de la branche locale d’une société musicale et participe à la création d’une école de musique à Tambov. Le soir, il joue de la musique de chambre en famille. C’est sans doute le décès dû à la tuberculose de sa soeur Alexandra qui pousse Hélène à réaliser son rêve : pratiquer la médecine. En 1907, elle est admise à suivre les cours à Saint-Pétersbourg. Elle commence à travailler dans un hopital privé ou règne le typhus. Au déclenchement de la première guerre mondiale, elle [photo ci-dessous : tenant un billet dans la main] est mobilisée dans l’hopital militaire. Elle sert ensuite dans un hopital privé dans la province de Vitebsk où la révolution bolchevique la surprend, tout comme la nouvelle du décès tragique de son plus jeune frère Serge Mikhaïlovitch, en décembre 1917.

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Ensuite, Hélène rentre à Tambov dans la maison familiale où son père vit avec sa seconde femme, Olga Alexeïevna Chemtschushnikoff (sa première épouse étant décédée en 1890).

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Elle séjourne également dans la famille de son frère Michel. En septembre 1918, son père est expulsé de la propriété familiale et emménage chez son fils Michel en n’emmenant que le strict nécessaire. Malgré l’extrême gravité de la situation dans laquelle se trouve la famille Boratinsky, on ne se lamente pas sur sa destinée. Michel Mikhaïlovitch commence à travailler comme agronome, apportant son aide aux fermiers dans l’amélioration de l’agriculture. Hélène se dévoue dans une clinique d’obstétrique, au point que c’est elle qui fera naître tous les enfants des environs ! En 1923, Hélène et Michel enterrent leur père. Capture d_écran 2017-08-04 à 11.30.14Celui-ci n’aura pas pu supporter le tragique décès de son fils Vladimir. Les années passent. Survient la seconde guerre mondiale. Hélène Boratinsky sert à nouveau dans des hopitaux, ce qui lui vaut une médaille pour son « valeureux travail ». Après la guerre, elle passe plus de vingt ans dans l’hopital de Gavrilovka, dans la région de Tambov. Le jour de son septantième anniversaire, elle est décorée de l’Ordre de Lénine [illustration ci-contre] pour « mérites envers la Patrie ». Elle passe les dernières années de sa vie avec sa mille à Irkutsk où elle est enterrée.

1.1.5.(b).11.2.8.8.4.(a).2. Michel Mikhaïlovitch Boratinsky
° 1880
Il fait partie l’Institut d’Agronomie de Moscou.

1.1.5.(b).11.2.8.8.4.(a).3. Sophie Mikhaïlovna Boratinsky
° 1882 + avant 1907
Après avoir effectué ses études à l’Institut Alexandrinsky, elle épouse un professeur de musique et quelques années plus tard, toute la famille déménage à Varsovie.
x Joseph Felixovitch Yarzhembovsky
° 1870

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Michel Boratinsky et  Joseph Felixovitch Yarzhembovsky

1.1.5.(b).11.2.8.8.4.(a).4. Alexandra Mikhaïlovna Boratinsky
° 1885
Elle meurt jeune en Suisse, atteinte de tuberculose.

1.1.5.(b).11.2.8.8.4.(b).5. Wladimir Mikhaïlovitch Boratinsky
° 1893 + 1922 
Violoniste dans l’orchestre Kirsanov en 1918.

Capture d_écran 2017-08-04 à 15.06.14

1.1.5.(b).11.2.8.8.4.(b).6. Serge Mikhaïlovitch Boratinsky
° 1895 + 12.1917 décédé accidentellement par suite d’un coup de révolver.

Capture d_écran 2017-08-04 à 15.06.28
1.1.5.(b).11.2.8.8.5. Marie Andreïevna Boratinsky
° 23.9.1855 + 20.2.1858
Soeur jumelle de Michel Andreïevitch [1.1.5.(b).11.2.8.8.4.]

1.1.5.(b).11.2.8.8.6. Nicolas Andreïevitch Boratinsky
° 25.4.1859 +  5.4.1862 Moscou

1.1.5.(b).11.2.8.8.7. Nathalie Andreïevna Boratinsky
° 21.3.1854
x Stéphane Nicolaïevitch Strekaloff
Maréchal de noblesse de Kirsanov, gouvernement de Tambov

1.1.5.(b).11.2.8.8.8. Anna Andreïevna Boratinsky
° 25.12.1857
x Basile Grigoriëvitch Kishkin

1.1.5.(b).11.2.8.8.8.1. Andreï Vassiliëvitch Kishkin
x Antoinette Preis

1.1.5.(b).11.2.8.8.8.2. Vera Vassilievna Kishkin
x Alexandre Timotheïevitch Kwatkowsky

1.1.5.(b).11.2.8.8.8.3. Helena Vassiliëvna Kishkin
1.1.5.(b).11.2.8.8.9. Alexandra Andreïevna Boratinsky
° 1860
x (a) Alexei Nicolaïevitch Obuchoff
x (b) NN Panafidief

1.1.5.(b).11.2.8.8.9.(a).1. Boris Nicolaïevitch Obuchoff

1.1.5.(b).11.2.8.8.9.(a).2. Nathalie Nicolaïevna Obuchoff

1.1.5.(b).11.2.8.8.9.(a).3. Hélène Nicolaïevna Obuchoff
° 25.1.1889

1.1.5.(b).11.2.8.8.10. Andreï Andreïevitch Boratinsky
° 26.10.1849 + ca 1850

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Mara – propriété de la famille Boratinsky près de Tambov

Capture d_écran 2017-08-04 à 16.05.13

1.1.5.(b).11.2.8.9. baronne Alexandra Lvovna de Bode
° 24.2.1828
Demoiselle d’honneur de l’Impératrice Alexandra Fedorovna.
Extrait des Souvenirs de Fedor Bouslaev, précepteur des enfants de Lev Carlovitch :

Capture d_écran 2017-08-04 à 15.49.34Je reviens maintenant à mes étudiantes du groupe des plus jeunes, c’est-à-dire Alexandra Lvovna et Elena Lvovna. Toutes deux étaient fort ravissantes mais chacune l’était à sa manière. La première, âgée de dix ans, ressemblait à une miniature, façon jouet de Nuremberg [illustration ci-contre], pleine d’esprit et de vie. Elle avait l’habitude de ne pas marcher comme tout le monde, soit les pieds bien à plat soit en sautillant avec grâce, sur la pointe des pieds d’une pièce à l’autre. Cheveux blonds, transparente, la joie et la gaité jaillissaient d’elle en permanence, toujours un sourire aux lèvres, capable de rire aux éclats. Toute sa vie, elle garda sa candeur d’âme, la grâce dans ses gestes et la justesse dans ses pensées, y compris dans ses années de vieillesse, jusqu’à sa mort. L’exubérance incontrôlée d’Alexandra dérangeait parfois les travaux.

Capture d_écran 2017-08-04 à 15.06.51

En effet, comment ne peut-on pas éclater de rire, même jusqu’aux larmes, lorsque dans les fables d’Ivan Krylov [illustration ci-dessus] on lit que les singes se mettent les doigts dans le nez ?… Bien sûr, j’avoue avoir commis quelques erreurs concernant les petites choses de la vie en société. Dans ces cas-là, l’humour décalé d’Alexandra Lvovna me faisait le plus grand bien. Parfois, elle se mettait à m’observer d’un air sarcastique, ce qui m’obligeait à corriger ma tenue, soit dans ma chevelure soit parce que ma cravate était de travers !

x prince Nicolas Andreïevitch Obolensky (sp)
° 3.1.1822 + 27.3.1867
Fils du prince André Petrovitch Obolensky et de la princesse Sophie Pavlovna Gagarine.

Suite des Souvenirs de Fedor Bouslaev, précepteur des enfants de Lev Carlovitch :

Quant à Alexandra Lvovna, elle épousa le prince Obolensky, l’un de ses jeunes hommes qui, souvenez-vous, venait du voisinage proche à l’église pour chanter dans le choeur avec la baronne Bode.
Ma vie était un peu compliquée, elle se répartissait entre l’université, les écoles et mes travaux littéraires. Tout cela me passionnait. Même durant les périodes de nos longues séparations, bien involontaires, Mikhaïl ou l’une de ses soeurs se rappelaient à mon souvenir en m’adressant des invitations pressantes.
En ce qui me concerne, les profonds liens d’amitié qui me liaient à la famille ne furent jamais coupés. Ce fut le cas avec la princesse Alexandra Lvovna Obolensky. Je ne l’avais plus revue depuis son mariage, sauf dans les années ’60, lorsque de retour à Moscou, elle avait emménagé dans une grande maison en bois avec colonnes, à proximité immédiate de l’Ecole de Commerce (celle où vécut Tourgueniev avec sa mère ?). Elle me salua avec chaleur et amitié comme si la veille encore je leur avais donné cours, à elle ainsi qu’à sa soeur Elena Lvovna qui hélas n’était plus de ce monde. Elle m’exprima son plaisir de me revoir, parlant sans arrêt, ne me laissant pas placer un seul mot, souriante et riante à la fois mais d’une manière assez contradictoire. Curieusement, l’expression de son visage, ses mouvements brusques, toute sa figure trahissait quelque chose de douloureux. Son sourire était triste, comme s’il elle se forçait, et dans son rire résonnait de l’inquiétude.
J’avais déjà remarqué cette triste transformation. Son mari, encore très jeune, dans la trentaine, était en fin de vie bien qu’il ne ressentait aucune douleur. Ses jambes étaient paralysées et il ne pouvait plus bouger. A un moment donné, on l’amena dans la pièce où nous étions. Il était installé dans une chaise roulante. Il semblait usé et vieilli. Recroquevillé sur lui-même, il haussait et rabaissait sa tête, se tournant vers moi lorsque je lui parlais. Alexandra Lvovna voulait me demander conseil. Dans sa triste situation, elle souhaitait trouver quelque chose pour se changer les idées, ne fut-ce un moment. N’ayant pas d’enfant, elle décida de se consacrer à l’éducation de ses neveux et nièces orphelins et d’en prendre soin. Je devais la guider et lui recommander des mentors pour les jeunes enfants d’Elena Lvovna ainsi que de Barbara Andreïevna, fille du baron André Andreïevitch Bode qui était son neveu, André Carlovitch étant le frère de Lev Carlovitch.

Capture d_écran 2017-08-04 à 12.01.43
Armoiries Bode-Obolensky

1.1.5.(b).11.2.8.10. baron Alexandre Lvovitch de Bode

1.1.5.(b).11.2.8.11. baron Dimitri Lvovitch de Bode
° + jeune

 

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